mardi 3 novembre 2009

Payer l'information en ligne ?

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Heureux de payer ! Le consommateur serait heureux de payer pour des informations générales en ligne (general-interest news) ! Telle serait la conclusion d'enquêtes menées par sondages en Australie, aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne, à la demande de News Corp. Conclusion : "If we get the the product and the delivery system right, people will happily pay for news content online" (publié par The Sidney Morning Herald). Une enquête Harris Interactive en Grande-Bretagne estime en revanche à 5% la proportion d'interviewés prêts à payer. Toute la différence tient sans doute à la méthodologie ! A quoi sert un tel sondage  sinon à  créer un peu de bruit favorable sur le mode de "l'opinion publique est avec nous" !
Le patron de News Corp. - qui aura tout dit et son contraire sur ce sujet - et dont le groupe détient un grand nombre de médias gratuits (télévision notamment) a décidé que le consommateur paierait son information, en commençant par le Wall Street Journal sur iPhone ou The Times (Londres) sur Internet. Il faut en finir avec le "free is good" enchaîne un autre qui précise : "I fundamentally believe readers are willing to pay for quality journalism". Voilà un énoncé limpide. Il croit. Il sait ce qu'est un "journalisme de qualité". Payer combien ? 

A quelles conditions, un internaute accepte(ra)-t-il de payer pour des informations en ligne ?
  • Il faut que l'information soit demandée, corresponde à un besoin de consommation exprimé. Et non qu'elle soit rencontrée ou proposée (vue plutôt que lue).
  • Il faut que cette information ne soit pas disponible gratuitement, ailleurs sur le net
    • Quelle information publiée en ligne par des sites de la presse d'information n'est-elle pas accessible gratuitement sur plusieurs sites concurrents fonctionnant selon un modèle publicitaire ? Accessible signifiant que l'on peut trouver par un moteur de recherche (y compris les blogs et les twits) ? Accessible dans quels délais ?
    • Pour de nombreux lecteurs, notamment pour l'information financière, économique, médicale, etc., la concurrence provient aussi de sites gratuits en langues étrangères. 
  • Ce qui n'est pas disponible ailleurs, ce qui est par définition exclusif, ce sont surtout des commentaires
    • Qui veut payer pour des opinions ? Qui n'a pas d'opinion ? Des opinions, voire même des idées s'épanouissent et s'échangent sur les blogs, les réseaux sociaux... qui valent celles des journalistes. Pour l'opinion, les amateurs souvent surpassent les professionnels.
  • Que le coût de transaction soit indolore et les ergonomies adéquates (claires, rassurantes). Plutôt l'abonnement que le micro-paiement (tel celui que propose Google à la presse), dit la rumeur (des sondages, encore!). 
  • Quel modèle écomique payant ?
    • Apple a imposé un modèle à la musique, aux applications (iTunes Store). Est-il adaptable à la presse ? Relay (Lagardère) permet à l'internaute de configurer ses propres alertes presse, de feuilleter des magazines en ligne, où se trouvent des réponses, avant d'acheter un numéro complet. Mais ceci ne vaut que pour des magazines de niche, publiant des informations rares et spécialisées, s'adressant à des "amateurs-professionnels" (point de croix, collections, jeux vidéo, "petits sports", histoire, etc.). Sur  iTunes, on achète un morceau de musique, pas un CD complet. En presse, cela signifierait acheter un article, pas un numéro complet. Ce qui ne manquerait pas d'affecter le modèle publcitaire. On dit que Time Inc. travaillerait à un kiosque électronique également. C'est aussi ce que promet maggwirre.com : "The iTunes of Magazine". Mais on s'est éloigné de l'information générale. 
    • Modèle freemium  (free + premium) développé par le marché des jeux vidéo : accès gratuit d'abord, puis les niveaux suivants, les versions améliorées sont payants. Le lecteur régulier de The Times paie 50 £ pour accéder à des contenus spécifiques (Times +, comme Sky +, sur le bouquet télé).
    • C'est un modèle à deux étages qui semble inspirer la presse : le déjà connu, le rassis est gratuit, l'info fraîche est payante... En langue de bois, cela s'euphémise ainsi : "free entry for a mass audience, with a charge for more up-market, high-quality data". Mais la valeur publicitaire de l'espace dans un contexte d'information gratuite risque de tendre vers le prix de l'info... Notons que l'exclusif d'aujourd'hui sera connu de tous demain, ce qui peut aussi conduire beaucoup de lecteurs à surseoir à leur lecture. Mais, comme chantaient déjà les Rolling Stones, "Who wants yesterday's papers? Nobody in the world"...
"Hypocrites lecteurs, mes semblables, mes frères", quelle information êtes-vous prêts à payer ?
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2 commentaires:

ACP Presse a dit…

8 internautes sur 10 refusent de payer l'info en ligne, selon une étude de Lightspeed Research et Trendstream (source : http://www.lefigaro.fr/medias/2009/10/13/04002-20091013ARTFIG00437-8-internautes-sur-10-refusent-de-payer-l-info-en-ligne-.php)

JordiA a dit…

Il est difficile d'estimer aujourd'hui qui serait d'accord de payer pour une information sur le web puisqu'on peut la trouver gratuitement ailleurs. En plus de la qualité rédactionnelle, les informations devraient donner quelque chose de particulier aux internautes. Mais quoi et comment ?
Le modèle freemium qu'utilise Apple ou Spotify fonctionne pour la musique et comme vous le dites, peut être appliqué pour des magazines de niche. Mais comment l'adapter à la presse de masse? Avant de proposer des abonnements payants, Spotify a attiré les clients potentiels en leur proposant une écoute gratuite, financée par la publicité. Après quelques temps, l'entreprise a proposé des abonnements premium et limité l'écoute gratuite. Si la presse veut mettre en place ce type de business model, le problème est qu’elle aura de la peine à proposer des articles gratuits pour ensuite les rendre payants. C’est d’ailleurs ce qu’on peut constater aujourd’hui : avec l’arrivée du web, les médias papiers se sont précipités sur le web et ont offert des articles gratuits. Une fois que les consommateurs ont eu accès gratuitement à l'information, ils ne veulent plus payer pour la même information. Cette erreur commise par beaucoup de médias remet en cause la survie de leur entreprise. Cette période de transition est donc très difficile pour les médias et à mon avis, un des moyen pour s’en sortir, est d’innover et de trouver un nouveau business model.