mercredi 16 novembre 2011

Mobiles immobiles

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"Immobile à grands pas", dit Valéry évoquant Zénon d'Elée... La mobilité est notion confuse. Elle recouvre des situations différentes, hétérogènes que souvent les analytics confondent encore en une même donnée fourre-tout. Dans le mobile, qu'est-ce qui bouge ? Quel est le référent ? Le contexte (social, géographique) n'est-il pas la variable essentielle ?

Mise à jour 19 janvier 2012

Distinguer hors foyer et mobilité
L'immobilité n'est qu'un cas particulier de la mobilité. D'ailleurs, dans les pays dits "émergents", les utilisateurs du Web mobile sont plus nombreux que ceux du Web immobile. 25% des internautes de ces pays ne se connectent jamais au Web immobile (70% en Egypte, 59% en Inde, 50% au Nigeria contre 25% aux Etats-Unis, 22% en Grande-Bretagne, 19% en Russie sont "mobile only"). Autrement dit, avec un plan ne s'adressant qu'aux internautes immobiles, il manquera au moins 25% de la cible aux Etats-Unis mais 50% et plus en Inde, etc. (cf. WebHostingBuzz). Les mobiles sont aussi bien des médias du foyer que des médias hors du foyer (Out-Of-Home voire même Digital Out-Of-Home).
iPad et iPhone : mobiles immobiles
Travail universitaire au domicile  ;
l'ordinateur "portable" est dans la chambre. 

Mobiles immobiles
Beaucoup de moyens mobiles, téléphone ou tablette, sont utilisés dans des situations d'immobilité, à domicile ou sur le lieu de travail, par exemple. Pourquoi les qualifier de mobiles dans ces cas ? Dans ces lieux, on utilise souvent le téléphone en marchant, en gesticulant. On confond mouvement et mobilité.
Multiscreentasking : les outils dits mobiles deviennent les connecteurs de médias immobiles, leur "cerveau" disent certains (Gartner)... Et  Siri (iOS 5) et les commandes vocales accroîtront sans doute la mobilité (mains libres) dans ces situations.

Immobile de plus en plus mobiles
L'ordinateur fut d'abord immobile (desktop). Mais il est de plus en plus transportable, portable (laptop) et les Ultrabooks (les McBook Air et leurs concurrents récents) seront bientôt aussi mobiles et aussi peu encombrants qu'un iPad. Le Chromebook est un peu plus lourd mais la durée de sa batterie et sa commodité le rapprochent de la mobilité connectée au nuage (cloud computing). Le clavier virtuel et l'autonomie de la batterie accroissent la mobilité : la tablette est un ordinateur sans connectique ni clavier.

La tablette n'est pas un smartphone
Non seulement les dimensions mais surtout les modalités d'usages ne sont pas les mêmes. Les formats publicitaires ne peuvent être les mêmes. Les applis non plus. La tablette les plus perfectionnées, même les plus petites qui tiennent dans la poche (Kindle Fire, etc.) restent sans voix.
Qu'apporte cette qualification simpliste de "mobile" appliquée indistinctement au téléphone et à la tablette sinon un faux sens, voire un contre sens ? Le mobile est immobile. Une enquête d'Efficient Frontier indique que près des deux tiers des contacts dits "mobiles" proviennent des tablettes.
Paris, métro. Regarder un film sur iPad
Selon une analyse de Ooyala, c'est surtout sur les tablettes que l'on regarde des vidéo de plus de 10 mn, tandis que l'on s'en tient à des vidéo brèves sur l'iPhone (cf. le blog de Wistia, "Managing video"). De même, il semble qu'avec leurs tablettes, les consommateurs dépensent plus qu'avec leurs smartphones, selon une étude Adobe Digital Marketing Business publiée en janvier 2012).
Que faire de la convergence qui se met en place avec iCloud, apportant une solution de continuité entre supports différemment mobiles et immobiles (iPad, Mac, iPhone, pour la marque Apple).
Et il y a mobilité et mobilité. Il y a l'usage consistant à donner une information en marche, avec Foursquare, Google Places ou d'autres services, généralement des applications, qui localisent les usagers. Il y a les usages dans les points de vente (listes, plan des linéaires, paiement, etc.). Ces utilisations se distinguent des usages qui ne sont pas liées à des déplacements (regarder un film, une vidéo longue, etc.).

La tablette est manifestement un média à part qui exige des créations publicitaires appropriées. Google a mis en place un format adapté à ce support dont la mobilité et les usages n'ont rien à voir avec ceux du smartphone. De même, InsightExpress a développé Tablet Adinsights pour évaluer l'efficacité des campagnes publicitaire des messages recourant aux tablettes.

La définition de la mobilité est encore pauvrement opérationnelle. Pourquoi ne pas définir la mobilité en prenant en compte l'endroit où l'on est allé : dans un point de vente, dans une gare, au cinéma ? La mobilité constitue-t-elle une variable sûre et suffisante de ciblage (comportemental) ? Les usages et les appareils eux-mêmes brouillent des catégories encore acceptables il y a quelques années (cf. le cas Walmart). Lesquelles sont pertinentes pour le marketing ? Comment, sur quelles bases, en former de nouvelles ? Le contexte de communication ?
Campagne publicitaire grand format. Janvier 2012.
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7 commentaires:

Yasmine a dit…

Selon un article paru sur internet (http://www.gizmodo.fr/2011/08/02/smartphones-tablettes-et-mobilite.html), une enquête Nielsen avait bien démontré que l'endroit favroisé pour regarder des contenus multimédia était le domicile, quel que soit le support. Plutôt qu'une segmentation mobile/immobile, il serait alors comme vous le suggérez plus simple de s'intéresser à l'endroit d'où l'on fréquente le plus sur la toile.

dan a dit…

On peut se poser la question si l’accroissement de cette tendance « mobile » correspond véritablement à une volonté des consommateurs par le besoin de communiquer « mobile », ou est-ce l’effet d’une offre toujours plus alléchante sur les Smartphones par les opérateurs, conscients de ce marché fortement lucratif. Différent blogs et sites internet (ZDnet.fr et lenouveleconomiste.fr) sur le sujet établissent des tendances marketing avenir selon le constat de l’évolution fulgurante des Smartphones. Malgré une focalisation sur le marché français, les articles mettent en évidence la volonté des opérateurs d’adopter un marketing agressif basé sur une approche du pricing, en d’autres termes des prix revus fortement à la baisse : abonnements moins chers, appareils gratuits (Smartphones ainsi que les tablettes électroniques – Samsung et iPad), ristourne sur appareil pour un nouvel abonnement ou encore facture de téléphone divisée par deux.
Malgré cette tendance du marché, il est aussi important de relever les nouvelles pratiques des consommateurs. On remarque que l’émergence des applications et autres instruments ludiques connaissent un franc succès. D’ailleurs, leur utilisation prime sur les programmes plus spécialisés comme des programmes complets de vidéo, photo ou de gestion en tout genre. Moins chers, moins compliqués, automatisés, pratiques et plus accessible, les applications ont la cote chez les consommateurs qui font rapidement le calcule des avantages et des inconvénients. Ainsi les tablettes électroniques permettent de réconcilier le besoin élémentaire du traitement de texte et celui des activités online et la gestion des fichiers, notamment avec les espaces libres et gratuit sur internet.

Raluca Mocanu a dit…

Je pense que la mobilité des appareils comme les smartphones ou les tablettes est souvent comprise par les gens comme la possibilité de les emporter avec eux partout et les utiliser lorsqu'il y a des temps morts… dans le train/métro/bus, pendant les pauses entre les cours universitaires, etc.
Donc, d'être des médias hors du foyer, surtout maintenant avec l'émergence de la WiFi partout.

Selon cet article de Google, 85% des appareils mobiles auront une connexion Internet active jusqu'à l'année prochaine.
http://googlemobileads.blogspot.com/2011/08/five-mobile-trends-to-watch-and-how-you.html

En ce qui concerne les tablettes il sont de plus en plus efficaces et répandues grâce aux outils et aux applications offertes. Ils sont très facile à utiliser, user friendly, et facile de les apporter.

Delphine ABDOU-FITTON a dit…

Je partage l'avis de Yasmine concernant la pertinence d'une segmentation sur la base du lieu de connexion plutôt que sur la nature de l'appareil utilisé. Pour les annonceurs en particulier, une telle segmentation permettrait d'optimiser les moyens d'interagir avec les consommateurs, notamment sur les lieux de ventes. Par exemple, fournir des informations telles que des avis d'utilisateurs au consommateur pendant qu'il fait son shopping est un excellent moyen d'entrer dans son ensemble de considération.

Arielle CMI a dit…

On ne cesse de parler du nomadisme croissant des individus, de la multiplication des devices (smartphones, tablettes ...) favorisant les usages mobiles mais comme en témoignent les chiffres, des devices comme les tablettes sont pour le moment largement utilisées chez soi ou au travail.
Je suis d'accord avec vous sur le fait que la notion de mobilité devrait être définie et les usages en mobilité rééllement associés à une utilisation du device en mouvement : de la consultation de ses mails dans les transports, à l'utilisation de la géolocalisation pour trouver un restaurant, en passant par l'utilisation de son mobile pour flasher un QR code en point de vente.

Stéphanie Micheloud a dit…

Je pense qu’il vaut mieux plutôt segmenter le marché en tablettes vs smartphones plutôt qu’en mobile vs immobiles car le smartphone est consulté à tous les instants tandis que la tablette est souvent utilisée pour une activité précise (regarder un film, jouer, prendre des notes). Et cette utilisation différente du smartphone et des tablettes suppose un format publicitaire adapté pour chacun.

CCHABAL a dit…

J'aime beaucoup la réflexion autour de la "mobilité immobile". Ce commentaire illustre bien ce fait puisqu'il est tapé via un appareil mobile mais à mon domicile.
Une raison principale: la réactivité de l'objet. Mise en route ultra rapide, ou souvent déjà allumé, le pc portable ou la tablette offrent des possibilités d'usages identiques à un pc de bureau, avec une miniaturisation physique qui lui permet de suivre l'utilisateur dans toutes les pièces, dans son lit, avec un rendement égal à celui de l'ordinateur traditionnel. La posture vis à vis de l'objet est inversée. C'est l'objet qui suit l'utilisateur et non l'inverse.