mardi 26 août 2014

Silicon Valley : six personnages de série en quête d'investisseurs


"Silicon Valley", série de HBO (Time Warner), met en scène les aventures d'une start-up, Pied Piper, à la recherche d'investisseurs.
La série fut diffusée le dimanche en prime time, à 10 heures, après "Game of Thrones", d'avril à juin 2014 (8 épisodes). Cette position dans la grille a dû contribuer au lancement ; la série a connu un honnête succès d'audience et cinq nominations aux Emmys (cf. Television Academy) : elle sera présente dans les grilles de rentrée de HBO (diffusée en Grande-Bretagne, en Australie, sur Orange OCS en France).

Source : Spectrum IEEE
Les personnages et les situations d'une start-up typique sont réunis : l'incubateur, le VC (venture capitalist), l'"elevator pitch" ( en quelques minutes, présentation de son idée par la start-up), reverse engineering (démonter une innovation pour la copier)...
A l'origine de la start-up se trouve un projet d'algorithme de compression musicale,  d'où son nom, Pied Piper, qui évoque, en anglais, la légende du joueur de flûte de Hamelin (Grimm, "der Rattenfänger von Hameln", 1842).
Le dernier épisode de la première saison est censé se dérouler au TechCrunch Disrupt à San Francisco, sorte de marché bi-annuel où se rencontrent des start-ups et des investisseurs ; tourné en studio, l'épisode constitue une satire féroce du milieu. Cf. Valleywag,"HBO's Version of TechCrunch Disrupt Was Better Than the Real Thing").

Télé-réalité ? Mike Judge, l'auteur, a été ingénieur dans la Silicon Valley, l'algo de compression (cf. formule ci-dessus) a été imaginé par un professeur de Stanford University et rôdé par l'un de ses doctorants, Vinith Misra.
Ce n'est pas du Pirandello mais la question reste : quelle est la réalité, où est le théâtre ? Réalisme, exagération ? Notons qu'il n'est pas si facile de rendre spectaculaires, pour figurer dans un prime time télé, un algorithme, le code, la limite de Shannon ou un taux de compression. Silicon Valley relève le défi, plutôt brillamment.

"Silicon Valley" veut  rendre compte de l'économie qui s'est concentrée dans cette région des Etats-Unis, de la société qu'elle a engendrée, décor de l'intrigue. Une économie avec ses manières, son style mégalo, ses rituels, ses clichés, son langage, sa vulgarité sexiste, la naïveté bonhomme des uns, la brutalité carnassière des autres sont ainsi présentés sans détour : on peut y voir une version californienne des "eaux glacées du calcul égoïste" (expression de Marx : "eiskaltes Wasser egoistischer Berechnung", 1848). On pourrait aussi y lire une moderne "American Comedy", à la Theodore Dreiser.

Ne boudons pas notre plaisir, voici une comédie souvent drôle et qui nous délivre des histoires de crimes et de prisons. Après l'échec de Start-Ups, HBO réussit à peindre cet "univers impitoyable", comme AMC a peint la publicité (Mad Men), ou Fox la médecine (House M.D.). Attendons la prochaine saison, la série est prometteuse.




3 commentaires:

Sandrine a dit…

Merci pour cette belle suggestion. Je vais donc connaître ce nouveau monde impitoyable à travers la série.

Alejandro226 a dit…

Depuis son annonce, j'attendais énormément de cette série, et je dois avouer que je me suis régalé. Rempli de références (de Jobs à la typo "en minuscules" des logos), et ayant un aspect politiquement incorrect, Silicon Valley s'adresse toutefois à un public non pas averti, mais un minimum connaisseur. Jonglant entre algorithmes et autres méthodes "scrum", Silicon Valley ne possède qu'un seul défaut : trop peu d'épisodes.
Vivement une saison 2 !

Laura226 a dit…

Je suis également enthousiaste sur cette série comique et satirique qui dépeint très bien les travers et les excès de la vallée. Comme à son habitude, HBO réussit à nous plonger de manière réaliste dans le quotidien et les codes d'un univers spécifique (les séries se situent en général dans des milieux sociaux précis). Le plus, avec cette série HBO aborde les questions dérangeantes qui se posent et nous éclaire sur les vices de la société moderne numérique.