mardi 10 décembre 2019

France, portrait social à 40 ans : les inégalités vieillissent


France, portrait social, Edition 2019, INSEE, 290 p. Chaque élément du volume (articles et fiches divers) comporte une bibliographie, 290 p., Glossaire, Index et Bibliographie générale, 19,8 €

Cet ouvrage synthétise les évolutions socio-économiques récentes observables en France.
  • Tout d'abord, il rappelle que la France métropolitaine, avec 65 millions d'habitants, a gagné 12 millions d'habitants depuis les années 1970, dont plus de 3 millions d'immigrés. 
  • En 2018, la population immigrée résidant en France s'élève donc à plus de 6 millions de personnes (9,7% de la population) alors qu'elle n'était que de 3,9 millions de personnes en 1975 (7,4% de la population). 
  • Le solde naturel en 2018 atteint à peine 118 000 personnes avec une fécondité en recul à 1,84 enfant par femme (solde naturel = nombre de naissances - nombre de décès enregistrés pour une période donnée). Ce solde naturel connut son maximum en 2006 avec 280 000 personnes.
  • La population française vieillit, 20% de 65 ans et plus en 2019 (contre 13% en 1975) ; elle a changé ses comportements au cours des quarante dernières années. 
  • Tout d'abord, la fécondité moyenne des femmes en France est toujours l'une des plus élevées en Europe. Mais l'âge de la mère à la naissance des enfants est de plus en plus tardif, il a progressé de 3 ans au cours des trente dernières années, de 1988 à 2018. On y voit un effet, entre autres, de l'allongement des études des jeunes femmes. Les taux de fécondité des femmes augmente pour celles qui ont plus de 30 ans,  faisant plus que doubler pour les femmes de 35-39 ans (2,9 en 1975 ; 6,9 en 2018). 
  • Quant au mariage, il a manifestement perdu une part de sa valeur symbolique pour les couples qui légalisent leur union de plus en plus tard, bien après leur emménagement. Les naissances hors mariage sont désormais la majorité, elles dépassent 60% mais 84% des naissances sont reconnues par leur père en 2017.
  • La monoparentalité, principalement maternelle, touche 9,3% des familles avec enfants mineurs, surtout parmi les mères les moins diplômées.
  • En quarante ans, la mortalité infantile a significativement baissé, tout comme la mortalité des 65 ans et plus ; ceci est dû au progrès des soins médicaux. L'espérance de vie à la naissance a augmenté, touchant les femmes (85,4 ans) et les hommes (79,5 ans).
  • La population immigrée a augmenté et frôle désormais les 10%, dont 30% de Maghrébins et 15% provenant de l'Afrique sub-saharienne. Les femmes représentent désormais 52% de la population immigrée. Les immigré-e-s sont dans l'ensemble plus diplômé-e-s et d'âge actif, plus qu'autrefois.
  • Quid de la mobilité sociale ? Pour les hommes, elle a peu varié entre 1977 et 2015, mais elle s'est améliorée pour les femmes, quelle que soit leur origine sociale : "les destinées sociales des femmes salariées se rapprochent nettement de celles des hommes".
On a l'impression que les inégalités reculent d'une manière générale mais ces travaux, très globaux, ne font guère voir la manière dont ces inégalités se recomposent éventuellement, discrètement, sous d'autres formes. On ne les voit guère, on les observe peu, encore, sous ces autres formes. Les statistiques montrent mais occultent aussi quelque peu les changements.

Comment ont évolué les préoccupations de la société française depuis quarante années ? 
La famille reste certes la source majoritaire de bien-être pour près de 60% des Français-e-s. Mais la plupart des Français-e-s regrettent de manquer de temps pour des activité extérieures, autres que le travail et les tâches domestiques. Les plus jeunes sont de plus en plus inquiets quant à leur état de santé (75 % des 18-24 ans) ; ils sont aussi plus inquiets du risque d'agression dans la rue.
Alors, la France, ça va ou ça ne va pas ? A vous de voir ... Les auteurs, elles, concluent : "plus de liberté, mais aussi plus d'inquiétudes". Les femmes ont massivement rejoint le marché du travail, et désormais tout le monde est favorable à cette évolution alors que seuls les diplômés de l'enseignement supérieur et les cadres y étaient surtout favorables en 1979. Mais dans l'ensemble, neuf personnes sur 10 attendent que la société se transforme (83% alors qu'ils n'étaient que 76% en 1979). A noter : la fiche sur le niveau d'éducation de la population (5.5) montre que, pour les 25-34 ans, les femmes sont 36,1% à disposer d'un diplôme supérieur à Bac+2 contre 29,6% des hommes. Cette évolution, si elle se poursuit, va poser des problèmes sociaux et culturels...

L'ouvrage, après l'examen des grandes évolutions socio-démographiques des quarante dernières années, s'intéresse à différents sujets. Trois dossiers : un sur l'évolution des familles monoparentales,  deux qui portent sur les effets des politiques fiscales récentes. Ensuite, l'ouvrage aborde, dans plus d'une trentaine de fiches spécialisées, les aspects démographiques ; il s'achève par une chronologie de l'année 2018 et un glossaire.
L'ensemble constitue un ouvrage de référence et de cadrage général pour ceux et celles qui ont besoin de connaître la population française et ses grandes composantes.

2 commentaires:

Lou-Eve a dit…

Monsieur,

Merci pour ce résumé du livre et la synthèse des questions qu'il pose.
En tant que femme, je constate effectivement que certaines inégalités reculent, notamment en terme d'accès aux études et au travail. Les femmes prennent de plus en plus de place dans la sphère professionnelle et ont de plus en plus de postes à responsabilité et c'est très bien.
Néanmoins, dans cette course à la performance, la société fait croire aux femmes qu'elles peuvent avoir des enfants après 40 ans sans problème ou encore qu'elles peuvent congeler leurs ovules si elles préfèrent se consacrer avant tout à leur travail.

Les femmes ne sont pas plus libres qu'hier sur certains aspects et ce sont souvent elles qui, malheureusement, doivent sacrifier leur carrière pour élever leurs enfants (car salaire plus bas).

Je pense que c'est tout le système qu'il faut refonder : les femmes doivent pouvoir travailler sans mettre en pause leur vie familiale, et leur désir d'enfant (quand il existe). Adapter les horaires pour les jeunes parents, proposer des crèches ou des modes de garde dans les universités, rendre le télétravail plus accessible etc.

Marion Prunier a dit…

Cette synthèse est très intéressante et met en avant certaines tendances que l'on aurait pu deviner assez intuitivement et d'autres qui s'avèrent plus surprenantes.
Je retiens tout particulièrement 3 points : le vieillissement de la population, l'évolution de la place des femmes dans la société et l'inquiétude grandissante de la population (et tout particulièrement des jeunes) vis-à-vis du futur. Ces éléments témoignent d'une certaine nécessité de changements au niveau politique et sociétal.
La différence selon le sexe pour les 25-34 ans de diplômés d'un bac+2 minimum m'a particulièrement surprise. Je me demande quels pourraient en être les impacts sociétaux ? Avec un monde du travail encore nettement plus favorable aux hommes, le fait qu'il y ait plus de diplôméEs peut-il se répercuter d'une quelconque manière ?