dimanche 8 juillet 2012

Régime culturel sans numérique

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Couverture du magazine papier
La Une de l'hebdomadaire allemand Der Spiegel invite ses lecteurs à s'abstenir de téléphoner, à se mettre au régime sans numérique ; ainsi tel Ulysse qui s'attacha au mât de son navire pour résister aux sirènes, il faudrait ligoter le smartphone qui tente de nous charmer et l'empêcher de nuire. On avait déjà organisé en France, il y a des années, des semaines sans télévision, des journées sans Web. Ah! le plaisir de se priver du smartphone ! Heureuse abstinence, douce prohibition, d'où vient une telle idée ? 

Le smartphone est devenu un appareil indispensable. Faut-il en conclure d'une maxime paraphrasant Descartes et son cogito ? "iPhone, also bin ich" ("je me sers de l'iPhone donc je suis") ou encore, "Ich teile, also bin ich" ("je partage donc je suis"). Ne prenons pas les utilisateurs (et les lecteurs) pour des imbéciles. Ce dont témoigne l'usage du smartphone, c'est d'un changement social, d'un besoin des autres et d'une amélioration des communications. C'est aussi un outil qui remplace l'agenda papier, le stylo et le carnet pour prendre des notes, la montre, le plan de la ville, le plan du métro ou des lignes de bus, un appareil photo, une lampe électrique, une calculette, un dictionnaire... Nulle pathologie ne s'en suit nécessairement.

A Boston, une pithie qui a un bon service de presse, s'autorise d'une position universitaire pour délivrer ses oracles, réponses à des questions qu'on ne lui a pas posées, et qu'interprètent, nouveaux prophètes, des journalistes. Que dit notre pithie ? Que nous sommes malades du smartphone, que le numérique dérobe nos loisirs, limite les relations directes, face à face, que tout cela engendre la solitude, le repli sur soi (bien que nous ayons aussi "perdu la capacité d'être seuls avec nous-même"), que nous perdons notre capacité d'attention, que nous sommes fascinés... Ainsi s'énonce le syndrome psychopathologique de la vie numérique : cette médicalisation systématique, où un historien voit le "dépotoir de l'insoluble", trouve dans la relation aux technologies un terrain d'expansion infini. 

Que fait la presse dans cette galère ? Ne s'efforce-t-elle pas de convertir ses lecteurs au numérique ? Pourquoi les journalistes ne mettent-ils pas en cause les affirmations des pseudo-experts au lieu de leur servir la soupe ? Est-ce le sujet le plus important de ces temps de crise pour lui consacrer un dossier de 12 pages ? Pourquoi la communication numérique et pas l'automobile, "the mechanical bride" ?

Der Spiegel sur iPad, sur iPhone, sur le Web... (copie d'écran)

4 commentaires:

Michael Barbosa a dit…

Aujourd'hui comme avant l'Homme a peur du changement à tord ou à raison. Néanmoins comme très bien dit dans l'article le smartphone est multi device et l'avenir sera très probablement un écran qui fera tout. Certe, on vivra dans une nouvelle ère celle du sans papier, de la connection every where mais est ce un progrès ou un danger nul n'est en mesure de le dire et seul le temps nous le dira.

Bird_face a dit…

En tout cas le sujet est très à la mode en ce moment, on peut aussi citer l'ouvrage de Thierry Crouzet "J'ai débranché" dans lequel il raconte son burn out après avoir été un bloggueur influent et comment aujourd'hui il renoue avec le numérique de manière raisonnable selon lui.

Stéphanie Micheloud a dit…

Il est vrai que la plupart des individus des pays développés possèdent un smartphone et ne pourraient plus s’en passer. Mais l’homme a toujours été dépendant des instruments qui lui permettent de gérer son temps ou sa vie : montre, agenda papier, téléphone, plans, cartes routières etc. Comme le souligne justement ce post, le smartphone combine tous ces instruments, ce qui le rend indispensable. Il l’est d’autant plus puisqu’il nous permet de communiquer constamment avec nos proches et connaissances, surtout par le biais d’application qui permettent d’échanger des messages gratuits ou de passer des appels gratuitement.

Par contre dans la communication face-to-face, il est vrai que le smartphone peut nous rendre moins attentif. Je ne dirais donc pas que le smartphone « dérobe nos loisirs » mais plutôt qu’il est susceptible de nous rendre moins disponible et moins investi car nous avons tendance à surveiller l’arrivée de nouveaux messages ou appels quelle que soit l’activité effectuée.

Et le smartphone ne résulte pas d’un soudain « besoin accru des autres ». Depuis qu’il en a les moyens techniques l’homme a toujours cherché à améliorer les canaux de communication. Aujourd’hui la technologie permet d’assurer une communication permanente avec les autres et cela est dû à un développement continu et souhaité.

Quant aux journalistes ils sélectionnent leurs sujets en fonction de l’actualité mais aussi en fonction de l’intérêt possible d’un thème pour le lectorat. Aborder le thème des nouvelles technologies, pour les critiquer ou les encenser, est une façon de s’attirer le lectorat.

Lou-Anne Duthoit a dit…

Nous devenons de plus en plus dépendant de notre smartphone, c'est vrai. J'ai d'ailleurs trouvé une publicité pour lutter contre la fin réalisée par des étudiants en communication. cette publicité parodie une publicité Iphone. http://www.youtube.com/watch?feature=player_embedded&v=pBNnWpbG4Uk