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dimanche 28 mai 2023

La situation économico-politique de la France en 2022

 Le Monde, hors-série : 40 cartes pour comprendre comment va la France, 11,9 €, bibliographie, 116 p.

Après un topo d'un spécialiste des sondages, ce hors-série commence par l'état des lieux qui s'ouvre par une manifestation des soignants dans la rue. Que peut-on en retenir ? 
Pour la répartition de la population sur le territoire, on voit un axe Metz-Limoges qui perd de la population tandis que la côte atlantique et la côte méditerranéenne, ainsi que la région lyonnaise en gagnent : "cap au Sud et à l'Ouest".
Il y a en France plus de 10% d'étrangers (en 2021) mais, qu'est-ce qu"un immigré ? Un enfant d'immigré, est-un immigré ? Quelqu'un qui est né ailleurs ? Quelqu'un qui ne parle pas (encore) couramment le français ?

La retraite ? Sujet de débats ? Les Français sont-ils pour ou contre ? Les syndicats sont contre, mais quel pourcentage de la population représentent les syndicats ? On dit qu'il y aurait environ 10% de syndiqués parmi les français qui travaillent.

Les Français sont âgés : 1 sur 10 a plus de 75 ans. Mais la desserte médicale du territoire est de plus en plus inégale et "l'hôpital est à bout de souffle" (p. 22). Une population qui vieillit demande plus en plus de soins. Il manque donc à la France beaucoup de médecins : les postes vacants de médecins sont inquiétants (oncologie, anesthésie-réanimation, médecine d'urgence, chirurgie).

Et le diagnostic se poursuit qui n'est pas très réjouissant : l'hôpital manque de personnel, 7,6% de la population vivrait sous le seuil de pauvreté (c'est mieux qu'il y a 50 ans, mais la moitié des "pauvres" a moins de 30 ans), la situation scolaire ne paraît pas très encourageante non plus (trop d'élèves dans les classes) et le diagnostic est bien simplifié.

Alors, "la France est un pays qui va bien dont les habitants se sentent mal", note le démographe Hervé Le Bras qui montre clairement les difficultés de l'analyse (pp. 64-65).
Le hors série s'achève par des considérations sur les régions et se termine par des conclusions politiques. Elles sont peu fiables, bien sûr. C'est l'affaire des "sciences politiques" : plus de politique que de sciences ! L'élection, cela ne marche pas : 53,77% d'abstentions au second tour des élections présidentielles parmi les inscrits. Et les non inscrits (p. 108) ? Et les "étrangers" habitant en France ? Les successeurs d'Alain Lancelot et Pierre Bourdieu ont du travail...



vendredi 14 novembre 2014

Facebook élu par les élections américaines


Les prochaines élections présidentielles américaines (novembre 2016) ont-elles déjà élu Facebook ?
Nous observons depuis quelque temps que Facebook fournit des données exclusives aux instituts d'études. C'est déjà ce que l'on peut observer en France, avec OCR (Online Campaign Rating), outil d'évaluation publicitaire de Nielsen / Médiamétrie pour lequel Facebook fournit les données socio-démographiques. Aux Etats-Unis, Facebook collabore avec Nielsen pour la mesure de l'audience de la télévision regardée sur des supports mobiles.
Facebook dispose d'une quantité de données de comportement et d'attitudes concernant 1350 millions de personnes (source : Facebook). De plus, ces données, rafraîchies fréquemment et interconnectées (non atomisées), permettent des études longitudinales.

Aux Etats-Unis,, les élections représentent un enjeu particulièrement important pour Facebook puisque la publicité électorale y est autorisée et qu'elle constitue une formidable source de revenus pour les médias. Dans la perspective des élections présidentielles de 2016, Facebook attaque ce marché dont profite surtout, jusqu'à présent, la télévision, nationale et locale. Notons que, pour annoncer sa politique d'immigration, le Président Obama a recouru à Facebook (cf. Byron Tau,"Obama Turns to Facebook to Announce Big News", Wall Street Journal, Nov. 19, 2014).
Lors de son entrée en bourse, Facebook avait prévenu que son ambition était de s'emparer du marché publicitaire de la télévision. A cette fin, Facebook dispose désormais d'une puissante force de frappe vidéo, notamment mobile.
Les élections vont-elles se jouer sur Facebook ? Le débat politique ne manquera pas d'y avoir lieu. De plus, Facebook sera la base d'analyses de sentiment politique ("sentiment analysis") effectuées à partir de son corpus langagier, immense et varié, naturel, actuel. Ces études seront mises à disposition des journalistes de Buzzfeed News et du network ABC, de leurs politologues et analystes électoraux (data journalism).

Que fera-t-on de telles données ?
S'il ne s'agit que de s'en tenir à la distinction entre opinion positive ou négative (opinion mining), il n'y a pas grand chose à en attendre, sinon des benchmarks donnant aux journalistes des occasions régulières de communiquer.
Mais Facebook aura aussi pour effet d'étendre le champ du politique et d'abaisser le "cens caché" qui barre l'entrée dans la politique (l'abstention a sa sociologie. cf. Alain Lancelot). Certes, ceux qui ne sont pas sur le réseau social, ceux qui n'y sont pas actifs resteront des "abstentionnistes". En revanche, même s'ils ne participent pas expressément à la discussion politique, les internautes actifs manifesteront sur Facebook des opinions, des sentiments, des émotions à partir desquels, grâce à l'analyse textuelle (NLP, deep learning), on pourra reconstituer des habitus susceptibles de prédire des dispositions politiques.
De telles analyses ajouteraient une dimension quali au quanti des sondages, un supplément d'âme, d'ethnologie électorale...

Source : Buzzfeed, The Facebook Election

lundi 27 avril 2009

Abstentionnistes ?


Après avoir déclenché beaucoup d'émotion chez ses membres en prétendant, en février dernier, détenir la propriété des photos et vidéos qu'ils avaient placées (uploaded) sur leur profile, Facebook soumit un nouveau protocole (Statement of Rights and Responsabilities) au suffrage universel de ses membres.
Selon les dernières estimations, moins de 1% (665 654) des 200 millions de membres (environ) ont particpé à ce scrutin d'une importance a priori considérable pour le réseau et ses membres. 
Facebook déclarait qu'il fallait que 30% des particpants approuvent le protocole pour que le protocole fût considéré comme accepté. 74,37% des votants ont approuvé le protocole (source : Facebook's general counsel).
Voilà qui donne l'occasion d'évaluer l'engagement, notion si chère à la profession publicitaire, et si confuse. La sociologie électorale traditionnelle indique que la participation électorale est un indicateur d'intégration sociale (cf. Alain Lancelot, L'abstentionnisme électoral en France, 1968). Sartre, plus direct, dans les Temps Modernes (janvier 1973), traduisait : "Elections, piège à cons". Hum ! le piège n'a pas fonctionné ! 
En tout cas, le peuple de Facebook n'a pas "voté pour le vote". Peut-être faudrait-il instaurer un autre mode de scutin, censitaire, où ne voteraient que les "citoyens actifs", ceux qui ont beaucoup d'amis, ou beaucoup de photos ! 
Les réseaux sociaux constituent des sociétés comme les autres. Les mêmes lois sociologiques s'y appliquent. Si c'est le cas, alors peu de membres se sentent intégrés dans la société Facebook. Attendons de connaître la sociologie de ce scrutin pour valider ou invalider ces deux hypothèses. 

Et vous, avez-vous voté ?

lundi 2 février 2009

Opinion publique à la demande


Internet facilite les sondages d'opinion, abaisse leurs coûts. On en est inondé.
Internet facilite le sondage mais pas l'opinion.
 
La faculté d'opiner n'est pas universelle, pas plus en ligne qu'ailleurs. La faculté d'opiner reste liée à une compétence. Mais le sondage présuppose que, tous, nous détenons, sur tout, un stock d'opinions "personnelles", prêtes à être "données" pour être vendues par paquets comme "opinion publique".

La faculté d'opiner reste liée à une motivation à un moment donné : il faut que le problème qu'impose le sondeur corresponde à un problème que l'on se pose déjà, que l'on a déjà rencontré, qui a mûri et formé une opinion. L'élection, le référendum demandent une campagne électorale pour instruire l'électeur. Il n'existe pas de question universelle, que tout le monde se pose et à laquelle tout le monde est prêt à répondre.
Or le sondage demande une réponse instantanée. Cliquer tout de suite, penser plus tard, si l'on y pense.

C'est le sondage en ligne qui fabrique l'opinion publique en ligne, qui la précipite. Donnant l'illusion démagogique de l'égalité devant la formation des opinions, donnant l'illusion qu'il y a des questions qui "se posent" à tous (notez la passivation), il fabrique à la chaîne des jugements publics. Artéfacts et contenus à bon marché qui dégénèrent en gloses. 
En fait, les spécialistes le savent : dans le sondage d'opinion en ligne, les résultats les plus révélateurs restent souvent les taux de non réponses. Et l'abstention en dit long aussi.
L'opinion publique en ligne n'existe pas.