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mardi 9 juin 2015

Média public, média privé ? La presse invisible

Vending machineAP File photo

La presse perd du terrain dans la ville ? Dans les rues, sa part de voie s'étiole. Sa présence publique s'effiloche...

Dans les rues américaines, les distributeurs (vending machines) disparaissent ; avec leur Une "above the fold" comme un écran de prime time, ils furent, il y a trente ans, le symbole du défi que USA Today (Gannett), le nouveau quotidien national, jetait aux grands networks.

En France, le nombre de points de vente presse diminue ; en même temps diminuent la longueur totale des linéaires, et donc l'exposition aux passants. Concurremment, les ventes au numéro chutent (sources : MLP, Turnover Points de vente ; presstalis). La notoriété globale de la presse, son image en pâtissent.

Dans certains quartiers, les kiosques à journaux, plutôt que la presse, mettent en avant des colifichets pour touristes, des friandises et des boissons ; leur affichage semble moins consacré aux couvertures de magazines et davantage à des produits de mode ou de "luxe".
Même la réduction des formats (passage au format tabloïd, format poche dans la presse magazine) qui accroit la commodité de lecture affecte la visibilité de la presse.

La papier recule partout tandis que la presse investit le territoire numérique, réduisant sa visibilité : sa présence en ligne ne compense pas son absence publique. La presse a été un média de l'espace public,(cf. Jürgen Habermas, "Öffentlichkeit") lu dans les cafés et les cabinets de lecture ; les lecteurs s'affichaient avec leur titre, l'arboraient comme un drapeau (cf.  L'Huma avec ses CDH, la vente militante, la fête annuelle). Sur tablette ou smartphone, certes plus commodes, la presse devient un média de la sphère privée, discret, caché. Ainsi, quand Metronews (TF1), gratuit du métro parisien, cesse de publier sa version papier pour n'être plus présent qu'en ligne, le titre s'évanouit quelque peu...

Le modèle économique mixte, papier + numérique, peut assurer à la presse à la fois sa visibilité et sa puissance. Même une fois diffusé, un titre papier reste visible, dans les foyers, les bureaux... Facteur de circulation, de reprises en main, de durée de lecture, audience secondaire !
Comment stopper cet évanouissement de la presse, maintenir sa visibilité et sa notoriété tout en gagnant en puissance (data) ? La presse pourrait peut-être, par exemple, efficacement compter sur les écrans de l'espace public (DOOH) pour recouvrer sa place de média public.

mardi 4 janvier 2011

Qu'est-ce qu'un média local (3) : La Liberté, quotidien de Fribourg (Suisse)

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La Liberté est un quotidien suisse romand, en langue française, édité à Fribourg depuis 1871. C'est un journal indépendant des grands groupes de presse. Le journal est vendu 2,5 francs (CHF) en semaine et 3,7 le samedi (soit approximativement 1,9 et 2,8 €). Il paraît 6 jours par semaine du lundi au samedi.
L'abonnement annuel s'élève à 378 FS. Notons qu'un rabais est accordé, sur demande, aux moins de 22 ans et aux étudiants (ainsi qu'aux chômeurs).
Le numéro du vendredi comprend un encart de 16 pages "TV sélection" qui donne les programmes de la semaine à venir. Le samedi, TV8, le supplément TV est vendu avec le quotidien (86 000 exemplaires vendus) ; il donne de manière détaillée, en une centaine de pages, les programmes de la semaine à venir. Le premier cahier de ce magazine, au contenu people, jeux, etc. semble rencontrer un succès publicitaire.
Le tirage contrôlé du quotidien (certifié Remp, Recherche et études des médias publicitaires), pour 2009-2010, est de 39 000 exemplaires. Le lectorat est de 101 000 personnes. Soit un taux de circulation supérieur à 2 : le titre engendre peu de lectures gratuites. Le lectorat est en progression (7,5% sur dix ans).
Différents cahiers de La Liberté. 
La concurrence régionale provient de La Gruyère, tri-hebdomadaire sud-fribourgeois (34 000 lecteurs) mais également de 24 Heures, le quotidien vaudois de Lausanne, sur les secteurs limitrophes des cantons de Vaud et de Fribourg (régions d'Avenches-Payenne-Moudon-Oron). Le Freiburger Nachrichten, qui vise la population de langue allemande dans la région de Fribourg, voit son lectorat progresser (41 000 personnes).
  • Le prix facial est ce qui surprend le plus un habitué des médias français : le quotidien régional est plus cher en France qu'en Suisse.
  • Deuxième surprise : pas d'aides de l'Etat, à la différence de la France. Seulement des tarifs postaux adaptés, comme partout dans le monde.
  • Presse qui ne perd pas de terrain, alors que les grands titres régionaux ou nationaux, gratuits (20 minutes) ou payants (La Tribune de Genève) connaissent des baisses de diffusion importantes
Le numéro du vendredi (comptages effectués sur ceux du 12 novembre et du 17 décembre) compte 32 pages réparties, comme toujours en 4 sections (cahiers) : une première section nationale et internationale, une section Régions, une pour le Sport, la dernière section compte une page "Jeunes", une page cinéma, une page de programmes télévision, une page multimédia, une dernière page, généraliste avec la météo et trois pages de publicité.
Le quotidien accueille au total 6 pages de publicité (sur 32). Dans le numéro de samedi, la quatrième section est ititulée  "Magazine Culture" (8 pages).

La Liberté est déclinée partiellement en accès gratuit sur Internet (http://laliberte.ch/). Un abonnement annuel à la version PDF du titre est vendu 199 francs (contre 378 pour l'édition papier). Le coût d'accès au PDF pour les abonnés à la version papier est de 35 francs.
Le site compte en page d'accueil de nombreuses vignettes clickables (petit format). Petites annonces immobilières, emploi. Des bonnes adresses (classement thématique). Le titre est présent sur Facebook.
Le titre a confié sa régie publicitaire à Publicitas.

Seule la section "Régions" est vraiement locale, une partie de l'information sportive également (en concurrence avec les pages Sport du Matin). La publicité et les petites annonces sont locales. Tout le reste est supra-régional (collaboration avec des titres francophones : Libération, Rue 89 et La Libre Belgique). Pour les informations en Suisse, La Liberté collabore à un pool rédactionnel et pubicitaire comprenant des régionaux non lémaniques ; il dispose aussi de rédactions décentralisées à Lausanne, Berne, Payerne, Bulle et Romont.
Les archives sont numérisées de 1871 à 1920, rendant l'histoire locale et régionale accessible à tous.

En résumé, à confronter avec notre approche d'un régional américain et d'un régional français :
  • Le positionnement du titre est délibérément généraliste et pluri-dimensionnel, local (Fribourg), régional, national et international. Le lecteur dispose avec ce journal d'une offre informationnelle complète.
  • Le titre se vend plus cher qu'un quotidien régional français (à titre de comparaison, l'abonnement annuel au Bien Public, quotidien régional de Bourgogne s'élève à 306 €).
  • Le titre maintient et améliore sa position sur le marché média malgré le développement de la concurrence numérique, de la télévision locale (la télé) et de la presse gratuite. "Cela signiifie que nous habitons très bien notre zone économique", résume Nancy Zürcher (responsable marketing).
  • La numérisation semble se mettre en place prudemment, lentement peut-être. Il s'agit sans doute d'être en phase avec le lectorat. Toutefois, étant donné l'importance de la population universitaire dans la région, des initiatives numériques plus hardies permettraient, peut-être, d'étendre le lectorat du quotidien et de moderniser l'image du régional. L'"infomanie", qui permet aux lecteurs témoins d'un événement d'alerter les journalistes par téléphone, pourrait aisément devenir la base d'un dispositif de crowd sourcing de l'info locale et régionale.

jeudi 14 octobre 2010

Rentrée universitaire gratuits

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Comme dans beaucoup d'universités et d'écoles, on trouve, chaque matin, à l'entrée de Dauphine des piles de journaux et magazines mis à disposition gratuitement. Quels titres ? Voici le résultat d'un peu plus d'un mois de relevés mis à jour durant l'année universitaire.
Ce post a été revu, complété et corrigé avec des étudiants de Master de Communcation Intégré. Certains de leurs commentaires, qui n'engagent qu'elles /eux, sont cités à la fin du post.

Inventaire
Une douzaine de titres sont présents à partir de la mi-septembre, la plupart d'entre eux déposés entre 7 et 9 heures. A la douzaine de titres régulièrement présents s'ajoutent des titres irréguliers, présents de temps en temps. Certains de ces titres "gratuits" sont vendus également dans le kiosque, à quelques mètres de là.
  • Des quotidiens payants 
    • Les Echos
    • Wall Street Journal (Europe)
    • Libération
    • La Tribune
    • France Soir
    • L'Equipe
    • Le Figaro
    • Le Monde (de la veille)
    • La Croix
  • Irrégulièrement, s'y ajoutent des périodiques payants, en petites quantités 
    • L'Equipe Mag
    • Be
    • Femmes actuelles
    • Stratégies
    • Paris Match
    • Management
    • Le Journal des Finances
    • 01 Informatique
    • Les Afriques
    • L'Agefi Hebdo
  • Des quotidiens gratuits
    • Direct Matin
    • 20 Minutes
    • Metro
  • Des périodiques gratuits, en fonction de leur périodicité
    • FUSAC ("English speaking resources and contacts")
    • Campus Mag, grauit des universités ("le magazine des années étudiantes")
    • A nous Paris
    • Le Petit Juriste ("fait par les étudiants pour les étudiants")
    • L'Etudiant autonome (journal d'information étudiant)
    • Le Monde campus (supplément au quotidien)
    • Grandes Ecoles Magazine
    • ZOO (magazine culturel sur la BD et les arts visuels)
    • Zoom Japon
    • La Grande Epoque (The Epoch Times)
    • Recrut.com (Le bi-media au service de l'emploi)
L'offre gratuite est large, diverse (une trentaine de titres). Le rythme de "disparition" des exemplaires est significatif des attentes et des intérêts des étudiants. Les magazines "féminins", quand il y en a, disparaissent les premiers. Sans sur-interpréter ces données, quelle information peut-on tirer de l'observation de ce "marché" gratuit, qui neutralise les effets du coût et de la commodité (pas de déplacement, pas de queue pour payer) ?
  • Des indications de ciblage : une même personne peut vouloir Be et Wall Street Journal. 
  • Pour un public qui a fait de l'anglais durant presque toute sa scolarité, et qui se spécialise en sciences de gestion, Les Echos et Wall Street Journal sont dans le même ensemble de considération. Le rendement scolaire avantage le second. Un jour prochain, la presse spécialisée de certains secteurs pourrait laisser sa place aux titres en anglais. 
  • Aucun titre en espagnol, en arabe ou en allemand, ni bien sûr en chinois ou en japonais (pourtant, l'INALCO- Langues O - est présent dans l'immeuble). 
  • Gratuits et payants sont placés par ce marché au même niveau d'offre ; les "gratuits" partent un peu moins vite, entre autres parce qu'ils ont déjà été lus dans les transports en commun.
  • Ce kiosque improvisé en self service constitue un observatoire des pratiques de presse plus véridique, quant à certains aspects, que les enquêtes déclaratives : bon terrain pour des tests ?
En étant présente ainsi dans les universités, la presse cherche à conquérir et fidéliser un lectorat jeune, mixte et diplômé (bientôt !) alors que se forment leurs habitudes média. La majorité d'entre ces étudiant(e)s seront cadres en entreprises, certain(e)s, comme beaucoup de leurs aîné(e)s en entreprises de communication et de publicité.

Commentaires d'étudiant(e)s du Master de Communication Intégrée

Camille Allard
Parmi les titres distribués, il y a également Stratégies assez régulièrement, mais depuis peu de temps. De mémoire, nous avons aussi le droit à d'autres titres de manière plus sporadique tels que the Herald Tibune ou El Pais. J'ai aussi déjà aperçu Le Parisien
Etant inscrite à Dauphine pour la 6e année déjà, j'ai pu voir évoluer l'offre. Elle est devenue à la fois plus large mais aussi plus aléatoire. Certains titres sont présents depuis bien longtemps et de manière régulière. D'autres "réguliers" sont apparus assez récemment (comme La Croix présent depuis 2 ans seulement). Des titres peuvent n'être distribués que très ponctuellement (à ma connaissance Be, Marie-Claire). La combinaison de deux éléments déclenche le "désintérêt" des étudiants :
  • Les titres sont distribués en très peu d'exemplaires : une centaine d'exemplaires pour une fac qui regorgent d'étudiants mais aussi de thésards, de profs, de personnel et d'intervenants. Les piles des titres les plus plébiscités partent donc très rapidement.
  • Les titres sont distribués tous les matins entre 7h et 8h30, il ne sont disponibles que pour ceux qui arrivent tôt. Or les étudiants ont des rythmes de cours très très irréguliers si bien que se met en place une heuristique de décision : "les seules titres toujours disponibles à tout moment sont 20 minutes et metro pour lesquels l'accès est facile." Le réflexe de consulter l'offre disparaît car son intérêt diminue. 
J-H 
Il est vrai qu'il reste souvent plus de gratuits, cependant les journaux qui sont sortis et lus pendant les cours (notamment en amphi) ou en pauses sont bien plus souvent des gratuits que des payants. Je ne sais pas si cela présente un intérêt mais on peut ainsi se poser la question de la lecture effective du quotidien après la prise du journal. 


Guillaume Trillat
Un phénomène intéressant vous a peut-être échappé. Tous les journaux distribués rencontrent un vrai succès... Sauf un : La Croix. J'ai pu faire ce constat également lorsque j'étais dans une précédente université, Assas Paris 2 pour ne pas la nommer. Passé 18h, c'est le seul journal qui reste. Je pense que le désamour des étudiants envers ce titre vaut le coup que l'on s interroge à ce sujet : qu'est ce qui repousse les étudiants dans la lecture de ce titre ? Est-ce le contenu ou plutôt l'image que l'on renvoie lorsque l'on lit ce titre ? C'est d'ailleurs le seul titre "communautaire" distribué à la fac. Je pense que ce titre souffre de son image de journal religieux (d'ailleurs de nombreuses pages sont consacrées au catholicisme). Un étudiant lambda essayera le plus souvent de se fondre dans le moule et de ne pas se faire remarquer et encore moins par sa religion. De plus, le nombre de catholiques pratiquants à Dauphine et qui le clament haut et fort ne doit pas être gigantesque. Mes suppositions se basent sur une constatation empirique de plusieurs années de présence à Dauphine.
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vendredi 29 janvier 2010

Le Parisien descend dans la rue

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Pour sa maquette améliorée, Le Parisien prend l'air de la rue. Ici, dans le 19ème arrondissement, rue de Belleville, table de camping devant le point de vente, vendeur beaucoup plus jeune que le lecteur moyen du titre et un cadeau symbolique. Ambiance sympa. Dispositif exceptionnel, lié à l'événement d'un jour : le prix du Parisien passe à Un euro.

Il serait temps pour les quotidiens payants de reprendre pied dans la rue, dans le métro, à la sortie des stations. La presse payante a quelque peu déserté cet espace public, abandonné aux gratuits qui en ont presque le monopole. Elle a perdu cette bataille et, pour une partie de la population urbaine, c'est la bataille de la visibilité, de la notoriété, de la proximité et finalement de l'audience mesurée, vendue aux annonceurs.
Le Parisien passe à Un euro : 1 €, c'est simple, facile, on n'attend pas sa monnaie, on n'a pas à entrer dans le point de vente, à faire la queue pour l'acheter. Le matin, le parisien est pressé. Dans le succès des gratuits, on n'a voulu voir que la gratuité quand il aurait fallu voir aussi la commodité, la gratuité étant une composante de la commodité.

Autrefois, L'Humanité était dans la rue, vente militante sur les marchés, au porte à porte, affichages sur les murs ; Libération, quand le journal à ses tout débuts se voulut populaire, fut dans la rue, vente militante. Distributions militantes. On a connu les crieurs de journaux : France Soir, Le Monde... que l'on relance dans certaines stations de métro à Paris, en relation avec les magasins Relay. Un début.

Pour être populaire, la presse quotidienne ne doit-elle pas redescendre dans la rue ?

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