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jeudi 28 décembre 2023

Médias : qui les possède ?

MEDIAS français. Qui possède quoi ?Le Monde Diplomatique, Décembre 2023 (double page centrale)

Qui possède les médias ? En France ? Non ! Utilisés par les Français(e)es, non et non, les médias français, seulement les médias français ! Donc aucun des fameux GAFAM (Google, Amazon, Apple, Facebook, Microsoft) n'est concerné, ni Netflix, ni Disney, ni même Uber, mais on n'en finirait pas de lister les "ni". Alors, à quoi bon cette présentation ? On ne saura rien de Twitter (reclassé X par Tesla) ou de Gmail ou de YouTube, ou encore des nouveaux produits de l'intelligence artificielle (ChatGPT, etc.). On ne saura rien non plus des géants chinois (Baidu, Alibaba, Tencent, etc.). Alors ? 

Dans le titre, au centre du tableau, est imprimé en tout petit, "français". Ah! Il ne s'agit donc que des médias français. Les lecteurs et lectrices du Monde Diplomatique auront ainsi l'illusion qu'il existe, autour d'eux et elles, des Français et Françaises qui peuvent vivre dans la douce illusion de consommer des médias français. Ce document est "devenu un classique", nous dit-on, à apprendre en classe alors, aurait-dit un de mes profs ... sait-on jamais ? 

Mais il y aurait alors un travail - des travaux - à accomplir pour répondre à la question "qui possède" les médias utilisés par les personnes qui vivent en France. Mais plus que du graphisme, utile certes, il faut surtout mettre en place des recherches en économie, en gestion, en sociologie peut-être aussi. Et d'abord, peut-être, qu'est-ce qu'un média en 2024 ? Qui doit répondre à cette question ? La recherche universitaire en économie et en gestion, d'abord ? Peu probablement les écoles de journalisme, trop dépendantes des médias...


vendredi 7 décembre 2018

Comcast - Disney, match retour sur terrain numérique


Walt Disney, client de Google Ad Manager
Comcast et Disney, deux méga-groupes de divertissement télévisuel, se sont opposés dans une double bataille pour l'achat. Disney a emporté XXI Century Fox tandis que Comcast emportait finalement le réseau européen Sky aux enchères.

Jusqu'à présent, Disney (ABC, ESPN) utilisait les services de Freewheel pour la gestion publicitaire (video adserving). Or FreeWheel appartient à Comcast.
Disney a donc lâché Freewheel. Et que pensez-vous qu'il arriva ? Ce fut Google Ad Manager qui l'emporta. Superbe occasion pour Google de pénétrer plus avant le marché publicitaire de la télévision :"With this new relationship, Disney will bring its entire global digital video and display business onto Google Ad Manager, which will serve as its core ad technology platform", déclare Google Ad Manager dans un bref communiqué de presse.

Effet indirect des fusions et acquisitions, des démantèlements en tous genres et des recompositions. Paradoxe étonnant : Disney, comme les autres grands groupes de télévision (AT&T, CBS) redoute Netflix, alors ils s'allient à Google à qui appartient YouTube... Pour Google Ad Manager, c'est assurément le marché du siècle ("a strategic relationship") que de prendre en charge et orchestrer la totalité du numérique publicitaire de Walt Disney (mobile, vidéo, display, applis, streaming aux Etats-Unis et à l'étranger) ; on parle d'un budget de dizaines de millions de dollars ! N.B. Google Ad Manager compte déjà de nombreux clients dans la télévision américaine : CBS (dont CBS All Access), AMC, A&E Networks, Bloomberg, Lifetime, The CW, BBC America...

Tout ceci confirme combien le marché de la télévision est la proie primordiale des GAFAM / FAANG : Netflix, Google, Apple, Facebook, Amazon ne pensent qu'à la télévision, depuis toujours. Chacun s'y attaque à sa manière.

Références

lundi 3 décembre 2018

Nexstar, premier groupe de télévision locale américaine


Nexstar Media achète les 42 stations de télévision du groupe Tribune Media Company pour 4,1 milliards de dollars (6.4 in accretive transaction) devenant ainsi le premier groupe de stations de télévision locale aux Etats-Unis. Le groupe Sinclair qui avait envisagé l'achat de Tribune Media Company (pour 3,9 milliards) a dû y renoncer alors que la FCC se montrait préoccupée ("serious concerns").
Nexstar Media possède déjà et gère 174 stations dans 58 DMAs, petits et moyens.

Au terme de la transaction, Nexstar acquiert 42 stations de Tribune Broadcasting dont trois lui donnent une présence dans de grands DMAs : San Francisco-Oakland-San Jose (N°6), Tampa-St. Petersbourg-Sarasota (N°11) et Phoenix-Prescott (N°12). Nexstar s'empare également de WGN America, chaîne cabsat accessible par 70% des foyers, et détiendra 31% de TV Food Network (le reste appartenant à Discovery) et d'une radio (WGN-AM). Mentionnons encore deux digicasts, Antenna TV and THIS TV ainsi que le site d'information sportive Covers Media et 5% dans l'équipe des Chicago Cubs (baseball, MLB). S'y ajoute encore un site d'analyse des programmes de télévision (TV By the numbers / Zap2it) Et, bien sûr, de l'immobilier.

Une fois l'accord de cession signé, Nexstar détiendra 216 stations dans 118 DMAs ("216 combined, pre-divestiture full power, owned or serviced, television stations in 118 markets") ; il lui faudra alors mettre en vente (divest) un certain nombre d'entre elles, dans une quinzaine de DMAs, pour se conformer à la réglementation sur la concentration (39% des foyers TV, les stations UHF étant comptées pour 50%). La plupart des stations à revendre sont affiliées : on dit que Fox se porterait acquéreur de plusieurs.
Dans le communiqué de presse, Nexstar réitère son engagement pour le localisme de la télévision.

L'adaptation du marché des médias traditionnels américains au numérique provoque de nombreuses fusions et acquisitions, aboutissant à la constitution de groupes plus puissants. Ces groupes seront mieux à même de résister aux Facebook (cf. Today In), Amazon, Google, Microsoft qui visent leurs annonceurs locaux ; ils seront mieux à même, également, de négocier le montant des droits de retransmission (fees) que doivent leur verser les MVPD (retransmission consent). Certains estiment qu'une telle acquisition risque de compromettre la diversité des programmes locaux. Mais qu'en est-il  de la diversité avec les GAFAM ?


Tribune + Nexstar



dimanche 2 décembre 2018

Gestion des médias numériques et morale


The Drucker Institute a publié son classement annuel des entreprises américaines cotées (NYSE, NASDAQ) les mieux gérées (best run), pour reprendre l'expression de Wall Street Journal. Des grandes entreprises du numériques y occupent les premières places confirmant leur puissance et leur solidité tant financière que managériale. Notons toutefois que la satisfaction des consommateurs n'est pas optimale.
IBM est à la dixième place, Facebook à la 23ème (insatisfaction des consommateurs), Disney à la 48ème, Netflix à la 126ème place tandis que Comcast est reléguée à la 186ème place, payant la légendaire insatisfaction de ses clients.
Méthodologie : Ici. Définition de l'efficacité (effectiveness) par The Drucker Institute : "faire ce qu'il faut et le faire bien" ("doing the right things well"). N.B. je ne trouve pas meilleure traduction...

Attention : il s'agit d'un classement qui ne concerne que les Etats-Unis. La situation serait sans doute différente si l'on prenait en compte la responsabilité sociale en Europe, notamment. Un bonne gestion ne doit-elle pas équilibrer responsabilité sociale et solidité financière ("financial strength"), le respect des lois et contribution au bien public ?

Ce qui distingue entre elles, à première vue, ces entreprises numériques et média, ce sont la satisfaction des clients et la responsabilité sociale. La morale, l'éthique ? Dans ce cas, encore un effort ! (cf. tous les manquements : The year of the miss).

Drucker Institute, Claremont Graduate University, December 2018





lundi 23 juillet 2018

Netflix et les GAFA. Le bal des acronymes


Le journalisme comme la pédagogie produisent des simplifications et parfois en abusent : on avait les GAFA pour désigner un groupe de quatre entreprises ayant en commun d'être américaines d'origine, de réaliser un énorme chiffre d'affaires et d'afficher une capitalisation boursière extraordinaire et une croissance soutenue. De cet ensemble, on extrait le duopoly, sous-ensemble désignant Facebook et Google caractérisés par leur domination du marché publicitaire aux dépens des médias (publishers, legacy media) mais aussi avec leur complicité intéressée.
La faiblesse conceptuelle de l'acronyme GAFA est gênante. Certains y ajoutent Netflix pour créer les FANG (Facebook, Amazon, Netflix, Google) ou FAANG (Facebook, Apple, Amazon, Netflix, Google) ou FAMGA, ensemble qui inclut Microsoft (GAFAM). Où met-on la barre ? Quid de Snapchat, de Twitter, de Spotify, de IBM ou Oracle, Adobe ?
L'hétérogénéité arbitraire de ces ensembles est flagrante. Ne vaut-il pas mieux s'appliquer à distinguer clairement ces six entreprises, plutôt que s'obstiner à les confondre ?
Simplifions, sans entrer dans le détail des diversifications en cours ou à l'essai en ne retenant que les principaux éléments de leur chiffre d'affaires.
  • Facebook et Google sont des supports de publicité et collectent des données avec l'accord, au moins tacite, de leurs utilisateurs, en échange de services (réseau social, courrier, messagerie, cartographie, etc.). L'essentiel de leur chiffre d'affaires (86% pour Alphabet / Google, la totalité pour Facebook) provient de ces métiers. Leur présence sur le marché vidéo et TV est significative (YouTube TV).
  • Netflix produit et distribue des films, des séries TV mais n'a aucun revenu publicitaire ; si Netflix étudie les comportements de ses abonnés (données de consommation), il ne se préoccupe évidemment pas de mesure publicitaire de l'audience (ignorant superbement Nielsen et consorts). En revanche, Netflix est annonceur et contribue au chiffre d'affaires des médias traditionnels dont il est par ailleurs client (achat de droits de séries, de documentaires aux studios, etc.). Netflix est un pur média (pure player).
  • Amazon est une entreprise très diversifiée : AWS (cloud computing, serveurs, etc.), production et diffusion de video (Prime Video), distribution de produits de toutes sortes (logistique, livraisons), points de vente. Amazon est un support de publicité, de plus en plus important, innovant. C'est aussi un annonceur.
  • Apple conçoit, fabrique et vend des appareils (ordinateurs, téléphones, tablettes, montres) et des logiciels pour les utiliser (servcies). De là provient l'essentiel de son chiffre d'affaires. Apple est annonceur et n'a pas de revenus publicitaires (sauf les App Store Search Ads). Tout comme Netflix, Apple ne se sert pas des données d'observation de ses clients à des fins publicitaires ; tout comme Netflix, il n'appartient pas à ce que son président a stigmatisé du nom de "data-industrial complex" (Tim Cook, 23 octobre 2018). Apple a ses propres points de vente. 
  • Microsoft conçoit, réalise et vend des logiciels : Windows, Azure (cloud computing, etc.). Microsoft est support de publicité et collecteur de données personnelles, notamment avec MSN, Skype et LinkedIn (qui s'apparentent à des réseaux sociaux). Microsoft est également annonceur. 
Du point de vue des médias traditionnels dont le modèle d'affaires est largement fondé sur la publicité, Netflix et Apple ne sont pas des concurrents directs ; au contraire, ce sont des annonceurs courtisés par les médias et les agences média, des clients prestigieux.
La fureur de dénoncer peut conduire à tout confondre. Les seuls points communs de ces six entreprises plurinationales sont d'être américaines (côte Ouest) et de recourir à un mode de production et distribution numérique fondé sur l'intelligence artificielle (données, machine learning, algorithmes, etc.) .
En confondant, on occulte. On occulte surtout la faiblesse croissante des médias traditionnels, particulièrement européens et les causes profondes, structurelles de cette faiblesse.

Si l'on n'y prend garde, les expressions GAFA, GAFAM ou FAANG constituent des obstacles épistémologiques à la connaissance économique, elles relèvent des obstacles de type linguistique ("habitudes toutes verbales", disait Gaston Bachelard), denkmittel biaisant ou bloquant l'analyse et la compréhension. La douteuse évidence de ces pseudo catégories nuit à la clarté. Qui a intérêt à cette confusion ?

Ce que vendent ces entreprises, principalement 
Référence

  • Gaston Bachelard, La formation de l'esprit scientifiques. Contribution à une psychanalyse de la connaissance objective, Paris, Vrin, 1934.

mercredi 20 juin 2018

(AT&T + Time Warner) + Appnexus = la riposte des médias traditionnels américains s'organise


AT&T pourra fusionner ses activités avec celles de Time Warner moyennant 85 milliards de dollars et un endettement très élevé (180 milliards selon Moody). Le ministère américain de la justice (Department of Justice, Antitrust Division) avait marqué son opposition à cette fusion verticale annoncée par AT&T dès octobre 2016. Le Tribunal de Washington (U. S. Court District for the District of Columbia) l'a autorisée (Memorandum Opinion, June 12, 2018) réfutant un à un tous les arguments du gouvernement dans un document de 172 pages. Le juge s'étonne même qu'un débat ait dû avoir lieu : "small wonder it had to go to trial".
Copie du début de la décision du juge Richard J. Leon
Cette décision peut ouvrir la voie à d'autres fusions dont celle, retentissante, en cours de discussion, de 21st Century Fox, soit avec The Walt Disney Co. (71 milliards de $, cash and stock), soit avec Comcast (65 milliards de $, "all cash" son endettement atteignant alors 170 milliards) ; elle crée une sorte de jurisprudence qui pourrait éveiller l'intérêt, par exemple, de Lionsgate Entertainment, des chaînes Hallmark Channel ou AMC, voire même des groupes CBS et Viacom. Selon le juge, la fusion Time Warner / AT&T ne restreint pas la concurrence, contrairement à ce qu'estimait le gouvernement et elle n'affectera pas négativement les consommateurs.
Toutefois, le ministère de la justice (DoJ) peut encore faire appel de la décision du juge Richard J. Leon et, de son côté, la FCC peut ajouter des restrictions à la fusion. La fusion avait été acceptée par la Commission européenne en mars 2017.

L'ensemble AT&T / Time Warner est apparemment considérable mais il faut l'évaluer en comparaison avec la puissance des acteurs intervenant désormais sur les deux marchés pertinents :
  • le marché de la télévision et du cinéma avec la concurrence des SVOD de dimension internationale : Netflix, Amazon Prime, Google avec YouTube, Facebook avec Facebook Watch, et peut-être bientôt Apple. 
  • le marché de la publicité numérique : Amazon, Google, Facebook et Comcast.
La fusion associe deux métiers : connectivity business pour AT&T, entertainment business pour Time Warner ou, autrement dit, l'intégration de la distribution et de la production de contenus (programming). L'ensemble nouvellement constitué par cette fusion comprend :
  • des télécoms (AT&T est le premier opérateur mobile américain avec 151 millions d'abonnés)
  • un important MVPD (avec son bouquet de télévision payante, DirecTV et U-verse) et un MVPD virtuel, DirecTV Now 
  • des chaînes de télévision : HBO et toutes les chaînes de Turner Broadcasting (CNN, TBS, FilmStruck, TNT, etc.), des chaînes sportives régionales
  • des studios de production cinématographique et de télévision (Warner Bros.)
Grâce à AT&T, les chaînes de télévision de Turner Broadcasting pourront accéder à leurs propres données de consommation ce qui leur permettra un meilleur ciblage publicitaire. De plus, AT&T a annoncé le lancement prochaine d'une chaîne sportive OTT (AT&T Watch).

L'argumentation du juge repose sur le fait que la concentration verticale ne modifie pas immédiatement le niveau de concentration dans chacun des deux marchés concernés ; au contraire,  la concentration verticale présente plusieurs avantages : elle réduit les coûts de transaction (bargaining friction, elimination of double marginalization) ce qui peut se traduire par une réduction du prix de DirecTV pour ses abonnés ; enfin, elle facilite la distribution direct to consumers (OTT, SVOD).
Néanmoins, l'ensemble issu de cette fusion serait bien loin de rattraper les Facebook, Apple, Netflix, Amazon et Google : il resterait loin derrière, "chasing tail lights".

La première réaction de AT&T, dès l'acquisition de Time Warner (rebaptisé WarnerMedia), est une autre acquisition, celle de l'adexchange Appnexus (1,6 milliard), acquisition qui renforce les moyens de AT&T dans la publicité numérique (programmatic, etc.). 

Quelles leçons pour l'Europe ?
Une consolidation européenne dans les médias semble indispensable ; est-il même une autre voie ? Il faut reconsidérer les questions de taille des entreprises médias : les entreprises européennes semblent sous-dimensionnées. Pour contrer les effets induits par la puissance des GAFA et de Netflix, que le juge américain qualifie de "tectonic changes", l'Europe doit revoir l'approche des questions de concentration, en revoir les outils d'analyse (l'opinion du juge émet notamment des doutes sérieux sur la validité de certaines évaluations d'audience).
Les règles anciennes ne correspondent pas à la situation nouvelle crée par les GAFA qui révolutionnent la notion de marché pertinent. Tout semble indiquer, si l'on en croit l'analyse du juge américain, qu'il faille encourager les concentrations verticales qui associent distribution et production de contenus. D'autant que le développement prochain de la 5G ne manquera pas d'affecter fortement la distribution des contenus...

mercredi 7 mars 2018

Suisse, débat sur la redevance et sur le secteur public de radio télévision


No Billag ? Non. Une votation a eu lieu en Suisse le 4 mars 2018 à propos de la redevance TV. Finalement, démentant les sondages, 71,6% des votants demandé le maintien la redevance qui finance la SSR (Société Suisse de Radiodiffusion et télévision). Une longue et dynamique campagne hostile à la redevance ("No Billag") a eu lieu, commencée fin 2015. Le référendum d'initiative populaire a été organisé suite à une pétition recueillant 100 000 signatures.
Billag est l'entreprise suisse qui perçoit actuellement la redevance obligatoire, redevance assise sur la possession de tout appareil de réception, y compris le téléphone portable et l'ordinateur ; la redevance s'élève à 451 Francs suisses par an (392 € ou 481 $). Bientôt, elle devrait baisser un peu pour les personnes et augmenter pour les entreprises...

No Billag ? Non mais... Au-delà du résultat, l'important est surtout qu'il y ait eu débat, que la redevance n'aille plus sans dire, que le principe même d'une radio-télévision publiques puisse être discuté. "Démanteler le service public", accusent les uns, refuser des "médias sous perfusion publique", se défendent les autres. "La SSR est tout sauf une vache sacrée", rappelle en arbitre le rédacteur en chef de la Tribune de Genève (19 février 2018), elle n'est plus intouchable : le débat reviendra et la SSR doit l'anticiper avec des réformes drastiques.
Le débat reviendra aussi dans d'autres pays d'Europe. Aux Etats-Unis, où pourtant il n'y a pas de redevance mais un versement volontaire, l'idée et l'existence même d'une radio-télévision publique sont discutées. Le Danemark vient de supprimer la redevance (mars 2018), la Wallonie (Belgique) l'a déjà supprimée...

En Europe, les secteurs publics de radio et télévision ont été conçus et mis en place dans un monde de médias de papier dominants. Des décennies avant la télévision commerciale (c'est l'inverse aux Etats-Unis). Leur vocation était culturelle et éducative, sans publicité aucune. Quel rôle concevoir aujourd'hui, pour la puissance publique nationale, en matière d'information et de divertissement, dans un univers numérique où triomphent sans partage des réseaux sociaux américains (YouTube, Facebook, LinkedIn, Twitter, Snapchat), un moteur de recherche américain (Google), la vidéo payante américaine (Netflix, Amazon), la radio payante internationale (Apple, Spotify) ?
Parmi les arguments des défenseurs de la radio-télévision publique, la défense des cultures nationales a été essentielle ; les artistes suisses, les organisateurs de manifestations sportives, le cinéma suisse ont été mobilisés... Quels moyens d'action sont aujourd'hui les plus appropriés pour défendre les cultures nationales, si du moins elles doivent-elles être défendues ? Quel secteur public construire pour développer la démocratie, renforcer les libertés ? La radio-télévision commerciale d'Etat est-elle encore un levier adéquat ? Les médias, tous les médias, ne devraient-ils pas être indépendants de l'Etat ?
La votation suisse invite à y penser, à douter, à remettre en chantier cette institution. On ne peut plus ne pas se poser la question. Question qui est du même ordre que celle qui concerne l'école publique, elle aussi bouleversée et affectée jusqu'en ses racines, par la numérisation.

Ce n'est qu'un début, continuons le débat !
En Suisse et ailleurs, le débat se poursuivra et son centre se déplacera, passant de la notion de radio-télévision publique à la notion plus large de médias publics. Car la presse aussi participe du service public d'information générale et de divertissement, l'affichage numérique urbain (DOOH) de plus en plus... L'information ce n'est pas seulement le débat politicien, électoral, c'est aussi la consommation, les modes vie, les loisirs et la presse magazine y joue un rôle important.
Qu'en pensent les plus jeunes générations qui ont mieux intégré la culture numérique et qui sont plus friandes de médias numériques étrangers que de télévision nationale, et qui réclament en Suisse le droit d'affecter les 450 CHF de la redevance aux médias de leur choix ? Avec Netflix et YouTube, la télévision n'est plus pour ces générations une affaire d'Etat.

La grande peur que No Billag a provoquée dans le cinéma suisse

mardi 25 juillet 2017

Anatomy of a hegemony. GAFAM oligopolies and media properties in USA


comScore (WPP) just published the ranking of the top 50 US digital media properties for June 2017 (sites, mobile and desktop; home and work locations), based on unique visitors. An opportunity to take stock, and to study the anatomy of a hegemony.
  • GAFAM first. It should not be a surprise: Google, Facebook (the so-called advertising "duopoly") are first in this ranking, then Microsoft and Amazon. Apple, which is not in the advertising business at all, is ranked N°9. Should it be part of the GAFAM family?
    • On the other hand, Microsoft is clearly one of the GAFAM, especially once taken into account LinkedIn (Talent Solutions) and its search partnership with Yahoo!. 
    • Not only GAFAM but also smaller social networks: Snapchat, already ranked N° 18, Twitter, N°13, and Pinterest, N° 26, are among the first US digital media properties .
  • We can observe the effect of recent consolidations: Yahoo! and AOL (Oath) should now be combined with Verizon; also one should combine Microsoft and LinkedIn, acquired recently by Microsoft, ranked N°16. Not to mention Comcast with NBCU. The new American administration will probably encourage concentration (AT&T + Time Warner?).
What about traditional media becoming digital?
The first media group in the comScore ranking (N° 6) is Comcast / NBC Universal (a cable MSO + commercial TV networks), CBS Interactive (commercial network) follows (N°8). ESPN (Disney / ABC) is relegated to N°31.

What about print media, newspapers and magazines?
Those most widely mentioned or talked about media properties are actually not the best ranked: The New York Time (N° 27), The Washington Post (N° 32, here, but shouldn't it be merged with Amazon?). The first newspaper ranked among the American digital media properties is also the only American national newspaper, USA Today (N° 14).
Magazines are doing a little better : Time Inc. (N° 11), Conde Nast (N° 19).
Should legacy publishers keep on feeding and legitimizing the new digital media with their content (see "La TV, horizon indépassable de tout média ?")?
Netflix is N°30. It will be more and more watched on smartphones, desktop and connected TV (or streaming devices). Its comScore ranking will surely improve.
Market capitalization ($ billion)

If we were referring to market capitalization instead of audience, then the ranking would differ slightly: Microsoft is ahead of Facebook and Amazon. Comcast, the major American media conglomerate, is far behind (1 August, 2017).

GAFAM is obviously still a fuzzy and deceitful working concept (stopgap). These 5 GAFAM do not have the same business structure. Their common strength lies probably in Artificial Intelligence (science, technology) and cloud computing (processing power). They are called "tech giants": how to figure that? Which indicators to choose? Advertising might only be the most visible aspect of GAFAM's dominance, merely a consequence, not a cause. How could legacy media end up winning the advertising battle? Certainly data is an opportunity but not without science, technology and engineers. Data is much more than just a coat of make up, a matter of speech.