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BYOD (bring your own device) : maxime nouvelle de la vie professionnelle dans un monde numérisé. Les entreprises acceptent, reconnaissent que leurs employés utilisent leur propres appareils sur le lieu de travail - ordinateur portable, smartphone, tablette (notamment iPad) ; elles l'encouragent même. Ainsi s'atténue, progressivement, la frontière entre bureau et domicile, personnel et professionnel (une appli comme Divide, acquise par Google, propose de les séparer : "keep your work and personal lives separate on a single device"). Phénomène engagé il y a une vingtaine d'années avec les équipements portables, ordinateurs puis téléphones. Effet de la banalisation de ces équipements, de leur usage, qui accompagne la chute de leurs prix, généralisant l'équipement personnel des cadres et la mobilité.
Cette indistinction, personnel / professionnel, profite aussi de l'effet accélérateur des suites bureautiques gratuites, des WebMails et de leurs périphériques (agenda, contacts, blogs, etc.). Dropbox, iCloud Drive, SkyDrive et Google Drive, entre autres, qui généralisent les sauvegardes sur cloud pénètrent profondément les TPE et les PME, les administrations (cf. Google Apps for Business) ; ces applications synchronisent les différents appareils, permettant la collaboration à distance, la téléconférence. L'adresse fournie par le Webmail fonctionne comme identifiant unique pour l'accès à de nombreux services sur de nombreux appareils : tout cela sonne la fin d'une informatique compliquée, chère et délimitée. La confusion du personnel et du professionnel est aussi accentuée par les usages des réseaux sociaux, usages à la fois professionnels et personnels (cf. les cercles de Google +) : il arrive même que les tribunaux aient du mal à distinguer ces usages : "Who owns your Tweets?".
Ainsi, la bureautique recourt de moins en moins à des spécialistes, laissant la place aux amateurs professionalisés (Pro-Ams). L'apprentissage continu de cette bureautique sans cesse mise à jour relève de plus en plus des magazines, de l'environnement professionnel ou familial : mutualisation des savoir faire. On attend seulement du lieu de travail, et d'ailleurs de tous les lieux (loisirs, éducation, transports), qu'ils fournissent une connexion Internet de qualité et sécurisée (cf. cisco : "La liberté sans danger pour le service informatique"). Il faut désormais pouvoir travailler de n'importe quel lieu, on ou off-line : la notion de lieu pour le travail, personnel ou professionnel, est de moins en moins pertinente. Les métiers de services ne font que suivre la voie ouverte par les artisans et compagnons qui possèdent depuis longtemps leurs propres outils : coiffeurs, maçons, plombiers...
Cette évolution est un défi continu pour les instituts mesurant et analysant les audiences du Web ; ils s'efforcent de recruter des panels d'internautes distincts, au domicile (home), sur le lieu de travail (work), les deux (both) ou à l'université. Recruter des panels sur le lieu de travail est depuis les débuts du Web davantage un signe de bonne volonté que de bonne méthodologie. Personne n'y a vraiment cru. La fusion "BYOD" (ou COPE, corporate-ownd personnaly enabled) des usages (et des cookies) sur de mêmes appareils rend superfétatoire une telle distinction (cf. Work and Home audiences. BYOD). C'est la fin d'une illusion et c'est tant mieux.
Aux panels de s'ajuster ; la culture informatique et bureautique change rapidement : par exemple, il y a de plus en plus de produits Apple au bureau alors que certains panels ne savent pas encore les prendre en compte. Il faut décidément recaler plus souvent les études de calage (establishement surveys) : équipements et pratiques numériques changent très vite.
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Les hiéroglyphes, une autre anthropologie
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Christophe Barbotin, *Le monde des hiéroglyphes. Une approche de la pensée
des anciens Egyptiens*, Paris, PUF, 2025, Repères chronologiques,
Bibliograph...