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mercredi 25 novembre 2009

TV: tivo the program and then google its audience

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Google a voulu apporter aux médias traditionnels sa méthodologie de médiaplanning et de vente d'espace. Après quelques mois, Google mit fin à l'expérience en presse et en radio car la mesure des audiences de ces deux médias ne permettait ni une approche opérationnelle du retour sur investissement ni la vente d'espace publicitaire aux enchères (CPM impressions).
En revanche, Google est toujours présent en télévision. Google TV Ads lancé en 2007 mobilise des données de plusieurs sources :
  • du bouquet Dish Network (Echostar ; 13,8 millions d'abonnés) pour exploiter les données foyers de la set-top box et vendre de l'espace publicitaire local sur une centaine de chaînes nationales dont ESPN (sport) et Lifetime (féminin)
  • de petits câblo-opérateurs
  • de 96 chaînes thématiques diffusées sur le câble, le satellite et les télécoms : des chaînes du groupe NBCU (CNBC, Oxygen, SyFy, Sleuth, Chiller, CNBC), Ovation, Game show Network, CBS College Sports, Bloomberg, Hallmark pour vendre de l'espace publicitaire national
  • et, depuis le 23 novembre, de TiVo, l'enregistreur numérique (3,6 millions d'abonnés). 
Google a acheté début novembre les données PRIZM (Nielsen) de segmentation socio-géographique des foyers américains et les a intègrées dans son module de médiaplanning TV pour le ciblage. Notons, à ce propos que les données de TiVo sont également mobilisées par TRA depuis juin 2008 ; TRA les fusionne avec des données de consommation issues de 70 millions de cartes de fidélité. L'ensemble vise à constituer une source unique (single source) de type média marché. TRA a également un accord du même type avec l'opérateur du câble Charter Communications. L'ambition avortée du projet Apollo trouve ici sa renaissance selon un modèle économique raisonnable et réaliste.
La collaboration avec TiVo apporte à Google des données comportementales sur l'enregistrement d'émissions et leur consommation différée. Si l'accord devait, à terme, concerner aussi TRA, Google accéderait à des données de source unique décisives pour les annonceurs.

Avec ces différents types de plateformes, Google dispose d'une base de données provenant de plusieurs millions de téléviseurs, dont 4 de Dish et 1,6 de TiVo (parmi les abonnements directs seulement). Google Ads couvre 96 millions de foyers américains (sur 114,5). Les données seconde à seconde sont anonymisées et permettent d'évaluer l'audience des messages publicitaires, et pas seulement des écrans. Croisées avec des audiences Nielsen elles établissent des profiles socio-démographiques ; en effet, les données googlisées n'apportent au départ que des informations sur la consommation globale du foyer tandis que le people meter du panel Nielsen fournit des données individuelles (déclarées). Sur de telles quantités de données, le travail mathématique de modélisation devrait permettre le développement de catégories de ciblage plus pertinentes que les socio-démo. Chaque plateforme autorise des tests (split run), de plans, de créations... préludant à la mise en oeuvre d'un plan TV, national ou local. N.B. : ces données sont indépendantes de celles que produit TiVo sous le nom de Stop//Watch.
Pour l'instant, il semble que le succès de Google TV Ads soit encore modeste ; toutefois, Google aurait recruté nombre de nouveaux annonceurs, notamment des petits annonceurs qui n'avaient jamais encore acheté de télévision et faisaient surtout du hors-média (marketing direct, publi-postage).
  • TiVo et Google ont fait leur chemin dans la langue quotidienne des Américains au point de devenir des verbes : leur réunion est symbolique de l'attention que porte Google aux comportements culturels et commerciaux de la population. Au tableau, ajoutons Google Maps et la mobilité : l'ambition de Google apparaît totale, au sens où l'on parle de "fait social total" (Marcel Mauss).
  • Google apprend la télévision, lentement, prudemment, modestement. Transférant à la télévision numérique des techniques acquises et mûries sur Internet dans la mesure des audiences (Google AnalyticsYouTube Insight) et dans la vente d'espace et de liens (Google AdSense, DoubleClick), Google travaille à la connaissance et à la structuration de l'univers télévisuel unifié. Petit annonceur deviendra grand...

vendredi 21 août 2009

Mesurer la TV numérique

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La mesure de l'audience donne l'une des clefs de répartition des investissements publicitaires, mais elle donne également l'une des clefs de répartition des investissements dans les programmes (planification et achat dans les deux cas). L'audimétrie TV, mise en place depuis une trentaine d'années dans le cadre de la télévision analogique, aura été, et de très loin, le meilleur dispositif de mesure des audiences d'un grand média.
Mais le passage au numérique et l'expérience d'Internet suscitent de nouvelles attentes chez les utilisateurs : immédiateté des résultats, réactivité tactique, sélection pointue des contextes rédactionnels, ciblage par les comportements observés dans la longue durée, par les comportements langagiers analysés (Google, Weborama), etc.
On attend de la télévision aussi qu'elle innove, et suive ces mêmes voies.

Aux Etats-Unis, la grogne des télévisions et des annonceurs, rarement consensuelle, s'exprime régulièrement, publiquement. Récemment, une association s'est constituée pour promouvoir l'invention de nouveaux outils. Il s'agit surtout d'inciter Nielsen à plus d'innovation. Un peu de concurrence est toujours favorable à l'innovation (on dit que ComScore aussi travaillerait à un projet de mesure conjointe télévision / online). Les participants : les groupes des networks TV (NBC Universal, Disney/ABC, CBS/Viacom, News Corp./Fox plus Discovery et MTV Networks), des annonceurs (Procter and Gamble, ATT, Unilever) et des agences média (Groupe M et Starcom). Enjeu de cette "cooalition for innovative media measurement" (cimm) : 70 milliards de $ d'investissments annuels. Pour ce projet, cimm a recueilli 100 000 $ dollars de chacun des 14 membres comme droit d'entrée.

Plusieurs problèmes sont posés, plus ou moins explicitement, par ces participants.
  1. Les audiences non mesurées, donc non commercialisables, se multiplient. Ce n'est pas nouveau, seule l'est l'ampleur du manque à gagner pour les régies des chaînes et pour les vendeurs de programmes.
    • télévision consommée hors du domicile principal : résidences secondaires, hôtels, restaurants, etc. (les campus universitaires ont été intégrés dans le panel, il y a peu de temps)
    • télévision distribuée hors du foyer (out-of-home) : transports, lieux de vie et de commerce de toutes sortes (stades, centres commerciaux, salles d'attente, supermarchés, stations services, etc.)
    • télévision consommée sur des supports autres que le téléviseur : ordinateurs, iPhones, Googlephones, etc.
    • programmes distribués hors télévision linéaire : VOD (gratuite notamment), différés (catch-up TV, etc.). 
    • N.B. Les chaînes organisent elles-mêmes cette distribution tous azimuts : elles ne sont donc pas victimes, comme on le dit parfois, mais acteurs délibérés de cette évolution. Elles passent des contrats avec YouTube, avec iTunes, mettent en place leurs propres plateformes alternatives, développent leur présence systématique "out-of-home", etc.             
  2. Il faut distinguer la gestion opérationnelle de la mesure (gestion et audit des panels, développement de logicels d'exploitation, etc.) d'une part, et la recherche fondamentale et appliquée sur la mesure (audiences, compréhension et prévision des comportements), d'autre part. La première consolide et améliore les outils courants dans le cadre du paradigme actuel, "traditionnel", tandis que la seconde travaille à un paradigme nouveau, "révolutionnaire" (ceci étant énoncé dans la terminologie de T. Kuhn). La première est conservatrice par destination, la seconde se doit d'être "iconoclaste". A ce stade du développement télévisuel, elles sont l'une et l'autre indispensables, non contradictoires : Aussi, peut-on voir, par exemple, dans la même semaine, Time Warner (CNN, HBO, TBS, TNT, etc.) renouveler son contrat avec Nielsen pour 7 ans ET élargir son contrat de diffusion avec YouTube (que ne mesure pas Nielsen avec son panel TV). Cette distinction est structurante :
    • Trop de marketing quotidien dans la recherche la stérilise et la condamne à  un rôle de faire-valoir commercial (les trop fameux et très onéreux communiqués de presse). 
    • Trop de communication irréfléchie à propos des travaux de recherche (mal programmée, mal vulgarisée, mal ciblée) nuit à l'image de stabilité des outils (comparabilité, analyses diachroniques), image de confiance indispensable à l'action commerciale. Du coup, on fait taire la recherche au nom de l'efficacité commerciale.
Que ces deux dimensions restent plus ou moins confondues, dans la pratique et dans l'opinion, est contre-productif, tant pour la gestion commerciale que pour la recherche.
L'association nouvellement créée viserait les chantiers de recherche à ouvrir : ampleur, budget, objectifs, calendrier. La question budgétaire n'étant pas la moindre (cf. Apollo). Elle ne remet pas en question la mesure actuelle.
Un prochain appel d'offres concernerait deux chantiers de recherche primordiaux :
  • Un dispositif de mesure globale des audiences dispersées entre divers supports de la télévision dont la diffusion online (Hulu, YouTube, iTunes, Boxee, TVanywhere, etc.), la VOD, la télévision différée (time shifting) et la réception mobile (iPhone, etc.). "Source unique" ou "360°" réduits aux seuls supports de la TV (puisssance et duplication). Mesure multi-plateforme, multi-écrans, à la manière de TAMI (Total Audience Measurement Index) mis en place pour les J.O. par NBC .
  • Le recours aux bases de données collectées par les distributeurs (opérateurs télécoms, câble, satellite).
La propagation, à court terme, de ces débats vers les marchés télévisuels périphériques (Europe, etc.) qui dépendent des grands annonceurs internationaux basés aux Etats-Unis, est prévisible.
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mardi 6 janvier 2009

Marketing research and its discontent


Out-of-home advertising business is growing. To become a real business, OOH needs a measurement tool that advertisers and media buyers can trust.
Nielsen is building a pilot for a syndicated service, PRISM (Pioneering Research for an In-Store Metric). Wal-Mart took part in this pilot but will not be continuing. Probably because Wal-Mart does not share data with syndicators. Moreover, Wal-Mart is developing its own service with DS-IQ for its digital network. And it is too expensive. Sounds a little like Apollo ... (cf. post du 26 février 2008). The times do not lend themselves to spending large amounts of money in what is certainly uncertain research.

Out-of-home measurement is still prisoner to all the problems that revolve around panels. Difficult and close to impossible to recruit respondents representative of  shoppers, passers-by, visitors of all kinds in malls, retail outlets, museums, stadiums, etc.
OVAB in the USA sets  guidelines for Out-of-Home media, which are not different from what is expected from in-home media (esp. TV): Opportunity To See (and/ or Listen) OTS/OTL, contact (still a fuzzy concept), Time Spent Watching and Listening (a type of "stickiness", nicely called "Dwell Time").

How to recruit panelists for this kind of measurement? Nothing new: the usual quotas (geographic, demographic, psychographic), but all based on declaration instead of random surveys and observations. How far can we trust these declarations to be true enough to build representative samples and longitudinal panels? Can we trust them to produce explanatory variables (independant or controlled)? How many phone calls before finding a single panelist? How many intercepts for an interview? This is why such research is becoming more and more expensive; this is why there are more and more non-representative panels, catch-all panels...

Research, sociological as well as marketing, is uneasy: from panel recruitement, from low cooperation rates. Who agrees to participate in panels, to answer questionnaires? We need iconoclastic research on the research conditions. An epistemological approach to research conditions. Passive, non-intrusive research is in! Ethnographical research (Erwin Goffman as in "Frame Analysis", Harold Garfinkel as in "Cognitive Sociology", etc.) will bring the indispensible qualitative dimension.

mardi 26 février 2008

Apollo, atterrissage en catastrophe

Testé depuis 2005 sur le marché de Houston (Texas, DMA N°10), le projet Apollo consistait en une énorme enquête de type source unique (single source), une de ces enquêtes où l’on obtient pour un même consommateur des informations sur ses achats de produits et sur sa fréquentation des médias (« consumer-centric vision »). Pour cela Nielsen fournissait des données de consommation (HomeScan) et Arbitron des contacts média radio et TV (Portable People Meter), à quoi s’ajoutaient des informations collectées en ligne sur les lectures de presse. Superbe théorie. Soutenue par de grands annonceurs de la grande consommation (dont Procter & Gamble, Kraft, Wal-Mart, Pepsi, Pfizer, SC Johnson, Unilever). Budget astronomique.

Conduit simultanément par les deux puissances légitimes de la mesure d’audience aux Etats-Unis, Apollo devait livrer des outils définitifs en termes de médiaplanning et des réponses opérationnelles quant au retour sur investissement publicitaire. Utopie cross-media de l’approche dite «360°». Tentation lancinante.

Devant la promesse d’un tel édifice, chacun y est allé de son discours de célébration, obligé, intéressé («Conceived as a breakthrough service for the next century», http://us.acnielsen.com/pubs/2004_q4_ci_media.shtml).

Et la langue de bois déversa ses power points.

Et pourtant, à y regarder de plus près, « sans prévention ni précipitation », ce projet conjuguait tous les traits d’une splendide usine à gaz, riche en tuyaux qui fuient et robinets qui coulent, en quotas introuvables et statistiques osées.

Et même sans le secours d’un très «malin génie», aux exigences de rigueur «hyperboliques», on aurait pu douter davantage : d’abord le budget, alors que beaucoup d’acteurs professionnels rechignent à payer la mesure de base, ensuite l’hétérogénéité de la collecte, la complexité du travail statistique qui s'en suit (fusion, modélisation, etc.) auraient dû inquiéter. Et puis, quand même, quelques médias étaient tenus à l’écart, Internet, la publicité extérieure, une grande partie des médias hors foyer (out-of-home), le marketing direct, etc. tout cela représentant bien plus de la moitié des investissements publicitaires.

Projet média pharaonique, dispendieux, aux nobles ambitions, qui était au marketing ce que le France et le Concorde furent à l’économie des transports grand public. Très grand panel (11 000 personnes dans 5 400 foyers, preque autant que le panel audimétrique national) pour un tel montage, mais si petit au regard de ce qui se peut pratiquer dans les médias numériques (TNS Media Research met en place un panel de 100 000 foyers avec DirecTV, par exemple). De plus, l' échantillonnage par quotas est si délicat qu’il est difficilement plausible : qui donc accepte de participer à ce type d’enquêtes, quelle représentativité, quelles études de calage adéquates au rythme des changements à prendre en compte ?

Cet atterrissage en catastrophe devrait signer la fin de ce genre d’aventures. Une époque des études publicitaires est en train de s’achever. Le numérique rend possibles d’autres approches associant consultations des médias et comportements d’achat, des tailles de panels passifs autorisant les échantillages aléatoires, des statistiques plus raisonnables.

Comment penser les conditions de l’erreur, l’épistémologie de tels fourvoiements : pourquoi une telle cécité de la part de si grands professionnels qui, mieux que nous, savent tout des limites nouvelles des formes traditionnelles d’enquête ? Difficulté de sortir des habitudes, de penser la rupture, même évidente, que consomment et l’évolution des médias et l’évolution des modes de vie. Peut-être aussi qu' à force d'être dans le feu de l'action, comme l'observe le Fabrice de Stendhal à Waterloo, il arrive que l'on n'y voit plus rien. En tout cas, ce sera une "erreur positive".