Internet remet tout en cause et notamment le journalisme sportif. La Major League Baseball américaine met en place de nouvelles restrictions à la diffusion de ses images sur Internet. Pas plus de 2 minutes de vidéo ou d’audio par jour enregistrées dans les stades de la MLB. Pas de streaming en direct. 7 photos par match au plus et pas de galerie de photos. Et tout ce qui n’est pas texte doit être retiré du site 72 heures après.
Le baseball suit ainsi le football (américain). La NFL (National Football League) a instauré depuis mai 2007 une règle dite des 45 secondes selon laquelle un site ne peut pas mettre en ligne plus de 45 secondes de documents vidéo par jour ("non game " audio ou vidéo). Seuls les détenteurs des droits TV sont exempts de cette règle. Exemple : l’équipe des Red Skins (NFL, Washington D.C.) interdit la publication de documents photos ou vidéo des matchs, interviews, etc. dans tous les médias, à l'exception des stations TV de l'agglomération (DMA). Elle filtre rigoureusement l’accès à la tribune presse et met en situation les bloggers n'appartenant pas à un organe de presse accrédité (la NBA applique la même règle pour le basketball). Droits incontestables puisqu'il s'agit d'enceinte et bâtiments privés. La presse en ligne est particulièrement vulnérable à cette règlementation. Rappelons qu'une étude promue par Akamai Technologies évalue à 20% de l'audience potentielle d'une émission la perte due à une présence illégale en ligne pendant 72 heures. Plusieurs groupes de presse protestent contre ces limitations : Hearst, Gannett, Time Warner (Sports Illustrated) ; la MLB a seulement infléchi la règle concernant les slide shows (passe de 7 à "plusieurs").
L’objectif des équipes sportives est bien entendu de drainer toute l’audience qu'elles génèrent par leurs sujets people ou sportifs vers leurs propres sites, qui couvrent copieusement les matchs en exclusivité et en tirent de substantiels revenus (400 millions de dollars / an pour la MLB). Des solutions sont testées : partage de revenus entre les bloggers et les équipes, délimitation des droits de copie des bloggers, etc. Rappelons que ces débats ont déjà eu lieu en France, dans les années 1980 au début de la radio FM quand des équipes refusaient l'accès des tribunes de presse aux gens des radio libres sous prétexte qu'ils n'avaient pas encore de cartes de journalistes. Une jurisprudence s'est mise en place alors.
Le même principe de self-publishing est à l’œuvre pour la retransmission télévisée des matchs. La NFL qui a lancé sa propre chaîne (NFL Network, http://www.nfl.com/nflnetwork) se bat pour la reprise de cette chaîne en bonne place sur les réseaux câblés et les bouquets satellitaires, pour qu'elle se trouve dans la partie basique de l’abonnement et non dans un ensemble payant (premium tier) consacré au sport. La NFL a porté plainte auprès de la FCC, la commission réglementaire, contre Comcast. Bataille déterminante car elle affecte l’initialisation des chaînes. Les bouquets (Comcast, Dish Network, etc.) rechignent.
Ces tiraillements permettent de voir se profiler de nouvelles règles du jeu dans la couverture des événements sportifs : les équipes sportives qui détiennent un contenu de grande valeur commerciale n’entendent pas se laisser déposséder de la moindre partie de ces droits. Pas plus que les studios de cinéma, les éditeurs phonographiques ou les musées. Joueurs de foot, acteurs ou scénaristes (cf. post ci-dessous), même combat !
Le passage au numérique, la facilité de production et de distribution qui s’en suit révolutionnent les droits sportifs et leur exploitation. Une fois la brèche ouverte, d’autres types de droits s'y engouffreront. Comme toujours dans les médias, le sport devance et expérimente les problèmes marketing à venir.
Exercice de simulation : imaginons que les équipes de football françaises, européennes appliquent des règles homologues. Conséquences dans les médias ?
2 commentaires:
La question des droits dans le sport va prendre de plus en plus d'importance, à mesure que va se développer le numérique. En effet, grâce aux nouvelles technologies, le mode de consommation va être bouleversé, on pourra regarder après coup les émissions que l'on aura raté. M6replay récemment créé répond à cet objectif. Cependant, les évènements sportifs font office d'exception dans ce domaine, car rien ne remplace le visionnage d'un match en direct, dans la mesure où c'est le résultat qui compte. On peut l'apparenter à de l'évènementiel, ce sont les plus grosses audiences. Pour mémoire, les deux plus grosses audiences de TF1 en 2006 étaient des matchs de la coupe du monde, il n'est pas sûr que les rediffusions après coup sur W9 et eurosport aient eu la même audience. Il est donc évident que les chaînes, les clubs, voire les fédérations se battent pour protéger leurs droits qui leur rapportent énormément.
L'idée américaine de vouloir contrôler les images de leurs sports est difficilement tenable car en restreignant de la sorte, elle pénalise son sport, il fait moins parler de lui, les supporters sont moins intéressés. Il n'est donc pas sûr que le consommateur accepte de payer un abonnement pour recevoir les matchs de la NFL, ou encore comme c'est le cas en France pour le foot sur canal +. D'autant plus que depuis quelques temps, l'économie du numérique nous a inscrit dans la gratuité, de la même sorte que l'on télécharge illégalement des musiques sur internet, il sera très difficile d'empêcher les amateurs de sport de visualiser des extraits. Il existe déjà des logiciels chinois qui permettent la diffusion d'évènements sportifs en streaming sur le net, il s'agit de sopcast et de tvants. Ils passent par la diffusion en direct de chaînes chinoises sur internet. Comment les fédérations peuvent-elles empêcher cela? si la NFL décide de le faire, elle rompt le contrat qu'elle a passée avec la chaîne chinoise, elle se prive donc du marché chinois (un milliard), est-ce bien dans son intérêt? On sait que des clubs de foot comme Manchester United réalisent une grosse part de son chiffre d’affaire avec les produits dérivés, pour se faire, ils vont mener des campagnes dans ses marchés, mais ils doivent avant tout se faire connaître par leur jeu. D'autant plus, que pour le moment, il est peu envisageable que les chinois demandent à payer pour recevoir chez eux la chaîne NFL. De son côté, la chaîne chinoise capte une part d'audience supplémentaire lorsqu’elle diffuse dans le reste du monde, ils peuvent augmenter leur droits publicitaires, c’est donc dans son intérêt de le faire.
Combattre internet n'est pas le vrai combat à mener car on sait tous que rien ne vaut la diffusion d'un match devant un bel écran plutôt que le recevoir en screaming avec des interférences. Les frais fans devraient continuer à recevoir chez eux les chaînes. Internet tend peut-être plus à devenir un complément à la télé, à savoir être l’endroit où se rencontre justement les fans mais aussi ceux qui veulent découvrir le spectacle.
Le vrai problème est pour les chaînes qui détiennent les droits de continuer à faire des émissions de qualité, et les équipes d’offrir un spectacle alléchant. Ainsi, le téléspectateur sera toujours inciter à assister à l’évènement. La NFL a donc raison de demander au bouquet de chaînes de la mettre dans les indispensables, elle est sûr de s’assurer d’une audience forte. Comme nous l’avons dit, on préfèrera toujours regarder cette chaîne devant la télé plutôt que devant l’ordinateur. L’internet ne sera qu’utile pour visionner des séquences après-match ou des interviews en différé. Restreindre l’accès à l’information aujourd’hui c’est se fermer l’audience de demain.
Les réseaux sociaux comme Facebook ou Twitter posent également des problèmes de droits pour les fédérations sportives. En diffusant leur logo, en publiant des photos ou des vidéos des manifestations qu'elles vendent normalement aux médias, elles en perdent leurs droits. Ceci les oblige également à limiter les activités de leurs sponsors sur ces réseaux. Ils ne peuvent pas diffuser les images qu'ils parrainent... Avec internet, les droits sont plus difficiles à appliquer...
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