dimanche 11 novembre 2012

Elections: televised and tweeted

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"The First Social Election" : l'élection présidentielle américaine a été un événement extraordinairement  médiatisé, servi, pour finir, par un formidable suspense. Les médias ont titré sur le nombre de tweets, le plus élevé de l'histoire - (sic) ! La peopleisation du politique trouve avec les médias sociaux matière à commentaire et statistiques, gages de sérieux et de rigueur.

Une semaine après l'élection de Barack Obama commence, avec le 18e Congrès du PCC, l'élection du président chinois ; 习近平 (Xi Jinping), actuel vice-président, sera sans doute élu. Aucun suspense. Aucune peopleisation. Couverture médiatique pré-électorale presque inexistante, délibérément limitée.
La Chine est la première puissance économique mondiale. Du point de vue de notre quotidien, elle nous concerne autant, sinon davantage, que les Etats-Unis. Mais l'élection chinoise n'est pas un spectacle.

L'écart de traitement entre ces deux événements comparables mesure-t-il l'ethnocentrisme culturel des médias occidentaux ? Plutôt que l'information, le modèle économique de nos médias favorise-t-il la célébration et le spectacle ? On s'interrogeait, autrefois, en science politique : "la télévision fait-elle l'élection" ? Aujourd'hui, on sait au moins que l'élection peut faire la télévision et des médias sociaux. Elections will be televised and tweeted.
On pense à Gil Scott-Heron (1974) qui se moquait de la politique et de l'information télévisées aux Etats-Unis en des termes publicitaires que n'aurait pas démentis Guy Debord : "NBC will not be able to predict the winner at 8:32" ("Revolution will not be televised", pour les paroles).


N.B. La métaphore du sport pour commenter l'élection est reprise en sens inverse. Exemple : "Every night is election night in the sports department", déclare le site de sport américain, SB Nation.
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16 commentaires:

Anonyme a dit…

La campagne électorale occidentale est considérée comme un produit comme les autres... Séguéla n'a-t-il pas créé "la marque Mitterrand"? Le loup de l'espace privé a été introduit dans la bergerie du public, souligne Gilles Achache avec justesse.
L'élection américaine oppose deux personnalités bien différentes, sur lesquelles se cristallisent tous les regards.
En Europe, aux Etats-Unis, tout est communication en politique. Prenons l'exemple du manteau de laine de Mario Monti, qui symbolise pour les Italiens la rigueur et l'austérité: cette thèse a fait l'objet d'un article entier (Les habits neufs de l'Italie post Berlusconi, Philippe Ridet, M le magazine du Monde). Tout est analysé, décortiqué.
Il me semble au contraire qu'en Chine, la communication politique et l'opinion publique n'existent pas. La censure politique est très active sur la Toile.
Dès lors, il semble assez logique que l'élection américaine fasse davantage parler d'elle sur les réseaux sociaux et sur internet, alors qu'en effet les deux pays sont des puissances auxquelles il semblerait tout aussi important de s'intéresser...
@elisanormand

Nastassja a dit…

Il est très intéressant de constater que l'élection américaine a été fortement médiatisé, à l'inverse de l'élection chinoise. Cela provient-il du fait que l'élection américaine fascine les audiences par le storytelling de ses candidats? Ou cela est-il le résultat du fait que les européens se sentent plus concernés par les décisions américaines que par les décisions chinoises? Certainement un peu des deux. Mais, je pense que l'élection américaine a été fortement médiatisée, car elle offre une histoire avec des rebondissements aux médias et à l'audience.

TessGirard a dit…

La médiatisation de l'élection américaine est la conséquence du suspens de cette élection. Plus il y a de suspens, plus il y de téléspectateurs, de tweets, tout le monde y va de son commentaire, de son pronostic. Le débat peut alors s'installer.

Mais comme le soulignait ironiquement un internaute chinois "Dur d'être américain. A un jour de l'élection, ils ne savent toujours pas qui va être leur prochain président. Nous, ça fait cinq ans qu'on le sait"

Ou encore : "Pourquoi donc les Chinois ont-ils montré un tel intérêt à l'élection présidentielle américaine ? Parce qu'ils ont abandonné l'idée de s'intéresser à la leur. Ils n'y sont pas autorisés!" dixit un autre internaute chinois.

Qu'est-ce que la télé ou les réseaux sociaux ont à faire d'une élection programmée, où le peuple n'est pas sollicité ? Aucun débat n'est utile, intéressant.

A moins que les réseaux sociaux ne soient utilisés pour faire une révolution ? Ce qui ne semble pas d'actualité..

Unknown a dit…

Après la réussite de Mr. OBAMA, devant son équipe de campagne, le président américain rééelu a remercié tous ses supporters, et visiblement très ému, laissé échappé quelques larmes.
I have to say, he do have a good team, I've seen his teaser "The road we've traveled", that was a excellent work!!! I do believe that touch every American people.
He is very good at promote himself and catch people's heart!

Marion Carnel a dit…

Je rebondis sur ce que dit Elisa. Il y a une vraie culture du storytelling en politique aux Etats-Unis, et en Europe également. Barack Obama a bâti sa campagne sur ça et il a démontré son efficacité en 2008.
Les réseaux sociaux qui rassemblent l'opinion et les communautés sont essentiels aux campagnes présidentielles américaines et européennes aujourd'hui.
Il s'agit aussi d'une population qui vote et donc chacun à son mot à dire et s'exprime sur cette élection démocratique.
C'est totalement différent en Chine où les dirigeants du PCC choisissent unilatéralement le remplaçant de Hu Jintao. En somme, il n'y a pas de surprise. Sur Weibo, le twitter chinois, un anonyme ironisait sur l'élection présidentielle: "Dur d'être américain. A un jour de l'élection, ils ne savent toujours pas qui va être leur prochain président. Nous, ça fait cinq ans qu'on le sait".
On peut comprendre que l'enthousiasme et le partage soient moins forts...s'ajoute à ça le musellement opéré par Pékin. Mais cela n' a pas empêché pas les chinois de réagir sur l'élection américaine qui, selon un article du Nouvel Obs, les fascine. Pour preuve, le producteur de musique chinois Gao Xiaosong a fait plus d'un millions de vue avec une vidéo sur le collège électoral américain !

Laura Graafen a dit…

Sommes-nous si ethnocentriques? Je pense que oui; les gens des pays occidentaux oublient souvent le reste du monde. Ou plutôt, c'est mieux de dire qu’on l'ignore ; on ne s’y intéresse pas!
Car en fait, on sait qu'il y a des élections en Chine, mais on ne s'informe pas sur ce sujet.
Pourquoi? Ouais, nous sommes ethnocentriques, mais pourquoi? On peut essayer de trouver la réponse en jetant un œil à ces deux élections:
- Les élections en Amérique; suspense de savoir qui va gagner. Et en plus les candidates font une campagne électorale forte, aussi sur internet. Les semaines avant l’élection en Amérique sont une vraie agitation. Par ailleurs, toutes les informations sont en anglais et faciles à comprendre pour le monde occidental.
- Les élections en Chine; pas de suspense, on sait qui va gagner (cela n'est pas assez intéressant pour le communiquer). En plus, il existe plusieurs barrières qui nous stoppent de chercher plus d’informations : la langue, la culture, le système politique.
Les différences entre la communication sur les deux élections en ligne (et surtout dans les médias sociaux) peuvent aussi être expliquées par ces barrières et différences culturelles. Les Chinois ne parlent pas de leur avis politique aussi librement que les Américains. On va rarement trouver des Chinois qui vont poster sur les élections (et si l’on trouve, ils vont poster en Chinois et on ne va pas comprendre). En général la politique Chinoise n’est pas un sujet sur lequel on débat.

@didoumartins a dit…

La difference de degré de mediatisation des deux éléctions n'est elle pas le resultat avant tout d'une difference totale de suspence ou d'un côté l'éléction américaine n'était pas gagné jusqu'au dernier moment alors qu'à l'inverse le succésseur chinois était déjà connu officieusement?

@MC_Francon a dit…

Cet article soulève une question de fond qui est : quels sujets doivent faire l'actualité ?
Est-ce qu'on nous parle des élections américaines parce qu'elles nous intéressent ? Ou est-ce que les élections américaines nous intéressent parce qu'on nous en parle ?
Est-ce que si les médias s'étaient un peu plus penchés sur les élections chinoises, nous n'en aurions pas dégagé une autre forme d’intérêt et des enjeux ? C'était en effet peut-être l'occasion de revenir sur la particularité de ces élections et de nous intéresser au gouvernement de ce géant.
Il est d'autre part réellement intéressant de constater qu'il nous ait aujourd'hui possible de suivre les élections d'un autre pays d'aussi près, en temps réel, avant autant d'entrain et d'implication.

Anonyme a dit…

Il est en effet très intéressant de comparer ses deux extrêmes.

Pour ma part, je pense que la communication électorale occidentale se rapproche dangereusement de la communication marketing commerciale !
L'émergence de la "société de spectacle", comme l'appelle Guy Debord, a donné une place toute particulière à l'image sous toutes ses coutures. Invitant chacun à faire de l'apparence un point décisif, et bousculant la société vers le faux semblant.
Cette ère du paraître fait éclore la peopolisation des hommes politiques. Cette stratégie leur permettant de se donner une image plus proche du peuple. Proximité d'autant plus importante grâce à l'outil internet.

La communication électorale occidentale est désormais tellement poussée qu'elle ringardise presque la communication marketing commerciale !
Beaucoup de citoyens s’intéressent d'ailleurs davantage au packaging de cet homme politique, plutôt qu'à ses valeurs et idées fortes.

Sans verser non plus dans le "tous pourris" et stigmatiser la notion de "normal" contre le "syndrôme du Fouquet's", il faudrait s'éloigner de la tradition d'une communication "copié-collé" à la stratégie commerciale, mercantile et idyllique par définition, et ainsi s'efforcer de replacer le quotidien des hommes et des femmes au coeur des débats.

Cette comparaison entre l'élection présidentielle américaine et l'élection du président chinois, reflète, je pense, très bien ce monde : toujours dans l’excès et la démesure !

Le monde occidental se veut spectaculaire. Ainsi une élection, comme vous dites sans suspens ou peopleisation (comme celle en Chine) n'a aucun intérêt pour ces occidentaux et leurs médias. Et ce, peu importe son impact sur notre monde ?!!

Victoire_Quitte

P2Ms a dit…

L'élection américaine de ce mois de Novembre a avant tout consacré les réseaux sociaux. Pour preuve, les tweets "This happened because of you" et "four more years" associé à la photo de Barack et Michelle constituent de véritables évènements (tweet le plus partagé et photo la plus "likée" sur facebook).
Ceci est le résultat d'une écrasante communication en ligne provoquée par les équipes de campagnes.
Il parait bien difficile d'exposer un programme même par une avalanche de textes de 140 caractères...
Phrases chics, photos chocs... c'est en substance ce que l'on retiendra de cette élection... sans grand suspens en fait.
Il parait alors difficile de justifier la non-couverture d'une élection chinoise sans suspens non plus certes mais dont les enjeux sont d'égale importance.
Grâce à Dieu, la corruption règne en Chine et nous donne du grain à moudre. En plus, la femme de Xi Jinping est une ancienne chanteuse... Sauvés, on entendra parler de la Chine.

Gallois 14 a dit…

L'article procédait à une comparaison avec l'"élection" chinoise, mais on peut également se poser cette question : la dernière élection présidentielle française a-t-elle fait spectacle ? Je crois que non malheureusement. Si l'élection américaine a autant fait parler d'elle, c'est pour ses caractéristiques propres : usage important des réseaux sociaux par Barack Obama (leader et pionnier dans ce domaine qui a su alors parfaitement s'adapter aux attentes des nouvelles générations), recours à la publicité politique (chose alors improbable et interdite en France), mise en scène "spectacle" des débats américains.
Si l'on doit comparer les élections en termes de suspens, il est évident que le prolongement des débats et la mise en avant de sujets brûlants ne font qu'alimenter les tweets et les échanges sur la toile (surtout dans une campagne "social media"). Il y a suspens dès lors qu'il y a un doute sur la personne qui va être élue, dès lors qu'il y a un duel légitime aux yeux de tous. Comme le mentionnait Marion, en Chine aucune surprise, puisqu'il s'agit d'un choix unilatéral...

Unknown a dit…

« L'écart de traitement entre ces deux événements comparables mesure-t-il l'ethnocentrisme culturel des médias occidentaux ? » => Et comment !
Quel exemple saisissant d’ethnocentrisme ! A l’heure où les moyens de s’informer se multiplient et s’intensifient, où l’information circulent plus rapidement, presque instantanément… Notre regard reste figé dans une direction, focalisé sur une partie du monde... Le paysage médiatique a changé, les nouveaux médias ont modifié nos usages, mais pas notre vision du monde. C’est un peu exagéré, mais je trouve cette image intéressante.
On peut expliquer la médiatisation différente des élections américaines et chinoises par les contextes politiques. Mais cela met également en lumière l’énorme impact des médias sur notre vision du monde. Comme cité plus haut par @MC_Francon, on peut se demander dans quelle mesure les médias « dictent » nos intérêts. Le plus important est d’être conscient que l’agenda setting des médias influence nos esprits chaque jour. On ne peut plus véritablement ignorer le reste du monde mais notre regard reste biaisé, ethnocentriste.
Pourquoi tant d’intérêt pour l’élection américaine et si peu pour l’élection chinoise ? La réponse est d’ordre culturel. Comme vous le dites, les élections américaines ne nous concerne pas davantage. Et pourtant elles nous intéressent davantage parce qu’elles sont construites comme un spectacle - et nous les suivons comme un spectacle. De ce point de vue, le numérique est un support idéal. L’information est transmise par des images fortes, des phrases courtes qui font le tour de la terre instantanément… Une idée, une photo, une scène, un tweet…

Lou-Anne Duthoit a dit…

L'ethnocentrisme de nos médias est saisissant comme le souligne Floriane dans son commentaire et cet article évoquant la différence de traitement de l'information lors d'une élection entre la Chine et les Etats-Unis en est un excellent exemple. J'ai l'impression qu'effectivement la culture du storytelling très développée aux USA et dont l'Europe raffole est une des composantes importantes pour expliquer cela mais ce qui me saisit aussi, c'est que cette problématique n'est que le haut de l'iceberg et que d'autres problématiques plus larges/graves se cachent en dessous: l'ethnocentrisme dont l'Europe fait preuve aujourd'hui en matière de cultures politiques a des conséquences et des enjeux que je mesure difficilement mais qui me semblent très grands...

Anonyme a dit…

il me semble que c'est plutôt une question de commercialisation de l'information par les médias. Ceux ci choississent, sélectionnent et mettent en avant les thématiques qui sont facilement vendables à leur cible (l'audience), et dans ce cas il est évident que les élections américaines ont plus de poids, vu aussi la censure toujours présente en chine.
@arifineghizlane

Em Anderson a dit…

Au storytelling et à l’ethnocentrisme on peut également ajouter l’emprise culturelle des Etats-Unis sur le Vieux Continent ainsi que le rôle des agences de presses. En effet de nombreux medias « européens » ne font, malheureusement, que copier-coller les dépêches de presse d’agence anglo-saxonnes sans traiter l´information. Cela peut également expliquer en partie les a priori négatifs porté aux puissances rivales des Etats-Unis dans le discours médiatique dominant.

CCHABAL a dit…

Je suis désolée pour les chinois, mais il est clairement évident que médiatiquement il est plus intéressant de suivre l’élection américaine que l’élection en chine. Je suis surement touchée par une vision ethnocentriste moi aussi (de manière involontaire). Mais bon, les hommes politiques chinois n’ont jamais été réputés pour leur sens du spectacle ni pour leur communication. D’ailleurs, à l’heure où Obama et Romney se battaient à coup de campagne de communication valant des millions et des millions de dollars, en Chine c’est un tout autre scénario déjà bien huilé qui se mettait en place. Un parti unique, donc un seul candidat. Qui est désigné sous les directives des membres de ce même parti. Tellement bien huilé, que souvent on connait le nom du successeur avant sa désignation. Enfin bref, rien de bien passionnant pour le côté extra politique qui est tant vendeur auprès du public occidental. En même temps, est-ce le rôle de la politique de se donner en spectacle ? C’est une question qui mérite une grande réflexion. En tout cas, tant que ça fédère autour d’eux (twitter, facebook, participation à des talk show..), les politiciens occidentaux semblent avoir choisi cette option.