Voici un ouvrage agressif. Mais c'est bien la moindre des choses que de dénoncer fermement l'histoire du patriarcat qui a étendu son pouvoir sur l'ensemble social, économique, militaire, religieux français.
L'auteur (Eliane Viennot, elle, préfère dire "l'autrice") est historienne et spécialiste de l'accès des femmes au pouvoir. Son ouvrage se lit aisément, avec plaisir même, bien que l'accumulation des faits - qui lui donne raison - finisse par ennuyer un peu. La période qui va d'un empire à l'autre, d'un Napoléon à l'autre, n'est pas brillante pour les femmes. Et l'auteur va explorer les lois, les textes, les théories, tous les innombrables discours qui oublient les femmes ou plutôt les ramènent sans cesse au repos du guerrier et à l'entretien des foyers, quand ce n'est pire. La loi salique domine en tout domaine pour exclure les femmes de tous les pouvoirs. Le titre dit "le pouvoir" mais il faut entendre "les pouvoirs" car tout le monde en est : pouvoirs politiques, pouvoirs économiques, pouvoirs intellectuels, pouvoirs religieux. Chacun de ces pouvoirs contribuent à l'exclusion politique et intellectuelle des femmes, chacun à sa manière, et ils convergent chacun avec son discours : ce demi-siècle est décidément terriblement uniforme sur ce plan.
Et la plupart des "grands" hommes de ce demi-siècle de surenchérir : Sainte-Beuve, Gustave Lanson et même Stendhal, Musset, et puis le pseudo-révolutionnaire Proudhon. Et Michelet, et Auguste Comte aussi ... Il faudrait tous les citer mais il y en a trop : même Marx et Engels ne peuvent être épargnés.
Les temps finiront par changer, certes. Mais il reste encore bien des moyens aux hommes de dominer les femmes : moyens sociologiques de la domination scolaire, par exemple, moyens juridiques (cf. Inégalités ? Les familles responsables, et complices, de reproductions inégalitaires qui durent). Quelques femmes échappent, mal gré tout, à la vindicte : Georges Sand, Madame de Staël par exemple. Et en 1859, une institutrice décroche le baccalauréat. C'est le signe des temps à venir, le début d'un rééquilibrage dans l'acquisition d'un capital culturel légitimé, rééquilibrage qui prendra quand même plus d'un siècle et demi. Mais aujourd'hui, les femmes sont les mieux diplômées.
Enfin, voici un bon livre qui fait le tour de la question et qui devrait permettre de changer le ton et les contenus des manuels d'histoire, dès l'école élémentaire, et d'histoire de la littérature, d'histoire des sciences et de la philosophie pour les années ultérieures.
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