jeudi 11 juillet 2013

Médias de la culture japonnaise en France : séries TV, animes, mangas et jeux vidéo

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Brigite Koyama-Richard, Mille ans de mangas, Paris, 2007
247 p. Ed. Flammarion, Bibliogr., Glossaire, 39,9 € 
L'annonce du lancement, en automne 2013, d'une chaîne dédiée à la culture japonaise (J-One) a confirmé et couronné une avancée de la culture japonaise en France commencée il y a plus d'une dizaine d'années.
J-One sera reprise par les opérateurs Canalsat et Numéricable. Elle s'appellera J-One car elle diffusera certains de ses programmes une journée seulement après leur diffusion au Japon. Elle traitera de "cultures pop japonisantes" (sic), ce qui devrait inclure les mangas, le cinéma, les séries, les jeux vidéo, les animesetc.
Dernière mise à jour 3/4/2018.
Il existe déjà une chaîne de télévision spécialisée, Mangas (crée en 1998, Groupe AB), ainsi que Game One lancée également en 1998 dont une partie de la programmation concerne encore les animes et les jeux vidéo (en 2001, Canal Plus a revendu la chaîne à Infogrames qui l'a revendue à Viacom). Enfin en octobre sera distribuée Anime Digital Network (ADN) née de la fusion des plateformes vidéo rivales, Genzai.fr et KZplay.fr. La chaîne NoLife, en revanche, a déposé son bilan en avril 2018. Elle avait été lancée en 2007.

La culture japonaise, exotisme, pour les Français, d'un "empire des signes" ? "Illusoire exotisme", dira Claude Lévi-Strauss. Sans doute... Le sabre, le chrisanthème, le go, le bonsaï, les estampes, le karaoké... "patterns of culture" ? On peut rappeler le japonisme des impressionistes, de Van Gogh, de Claude Debussy (une estampe de Hokusai trônait dans son salon). "La folie Japon", titrera L'Obs à la une (avril 2019), après Julie (novembre 2013).

Depuis de nombreuses années, la culture japonaise est représentée dans les médias français par trois genres alliant "modernisme et tradition", comme le sous-titrait, à son lancement, le magazine Planète Japon (mars 2005).
  • les mangas, accueillis en France par une puissante culture de BD, 
  • les jeux vidéos : "Legend of Zelda", "Final Fantasy", "Pokemon"... 
  • les animes (version animée des mangas) qui ont conquis un large public, en commençant par le public des enfants et adolescents, notamment grâce à la télévision ("Goldorak", "Ken le survivant", "Dragon Ball", "Olive et Tom" !)
Mentionnons, pour mémoire, le groupe japonais Rakuten (e-commerce de type amazon) ; il a acheté PriceMinister en 2010, lance en Europe un service de vente vidéo (Wuaki.tv). Ce groupe qui fut l'un des premiers investisseurs de Pinterest, qui investit dans le sport et le voyage, pourrait être amené à jouer un rôle sur le marché français de la culture.
France NewsDigest
juillet 2013
Hors des médias, la cuisine japonaise s'est faite une large place dans la restauration rapide et la gastronomie raffinée. Les arts martiaux ont également provoqué l'intérêt pour la culture japonaise : le judo d'abord, le karaté, sports où rituel et tradition (respect de l'adversaire, politesse) occupent une grande place. En revanche, les arts classiques et traditionnels (cérémonie du thé, ikebana, haïku...) ou la littérature (invitée d'honneur du Salon du livre en 2012) n'ont guère débordé les cercles spécialisés (cf. Haruki Murakami, "Kafka sur le rivage", par exemple) et ont à peine affecté les médias. Seul le cinéma d'auteur, et encore, s'est approché du grand public : Kurosawa, Kobayashi, Mizoguchi, Imamura. L'exception vient des animes : Miyazaki, auteur fameux de mangas est devenu populaire avec des animes aux succès considérables : "Mon voisin Totoro" (1988), "Princesse Mononoké" (1997), "Voyage de Chihiro" (2001), etc.

Dans la presse française, la culture japonaise a donné naissance à nombre de magazines et hors-séries. Pour les trente dernières années, on compte 120 nouveaux titres et hors séries consacrés, exclusivement ou principalement, à différentes formes de culture japonaise (source : Base MM) : arts martiaux, cinéma, séries, santé, animes, bonsaï (esprit Bonsaï), cuisine (Wasabi), estampes, gastronomie, jeux vidéos, tatouages, automobile, pêche, mode, érotisme, jardins, calligraphie, etc., quelques gratuits pour les Japonais en France, surtout à Paris (cf. Zoom Japon, France NewsDigest, etc.). Notons encore le mensuel Japon Infos : un regard différent sur l'archipel (2017), un trimestriel féminin pour enfants, publié depuis 2012 par les éditions Milan, Julie Kokeshi ("kokeshi" désigne des petites poupées traditionnelles en bois peint, cf. infra). En janvier 2017, paraît un nouveau trimestriel, ATOM, consacré à "la culture manga" (9,9 €) ; en septembre, Art of Japan (trimestriel, 14,9€, par Oracom). Signalons Koï qui vise plus largement les cultures asiatiques en France.
Planète Japon
Juillet 2013
Finalement, de toutes les formes de culture japonaise, après la cuisine, c'est le manga qui l'emporte en France, indirectement au travers des animes, directement en volumes papier : "Akira", "Naruto", "Hikaru no go", "Death Note", "Fullmetal Alchemist", "One Piece", "Ranma 1/2"... 1 600 titres seraient publiés en France chaque année. Ce succès du manga ne cesse d'étonner les auteurs japonais...

N.B.
Pour ceux qui s'intéressent ou veulent s'intéresser au manga, signalons le bel ouvrage introductif de Brigite Koyama-Richard (cf. supra) remarquable défense et histoire illustrée de l'art du manga.
Autres ouvrages évoqués :
  • Claude Levi-Strauss, L'autre face de la lune. Ecrits sur le Japon, Seuil, 2011
  • Ruth Benedict, The Chrysanthemum and the Sword. Patterns of Japanese Culture, Tuttle Publishing, 1954
  • Roland Barthes, L'empire des signes, Seuil, 1970

3 commentaires:

Anonyme a dit…

Il est intéressant de noter que l'adoption par les pays occidentaux (si tant est que le Japon n'en soit pas un) de la culture japonaise s'effectue avec un filtre teinté de l'exotisme inhérent à cet archipel. Alors même par exemple que Yukio Mishima est un auteur largement renié au Japon, apparenté au militarisme et au nationalisme exacerbé, ce dernier occupe une large place dans les librairies consacrées de la capitale française. Il renvoie ainsi à une forme de "japonité' dont les caractéristiques renvoient au stéréotype du samurai dévoué au Bushido.
Néanmoins ce que l'histoire japonaise révèle, c'est que sa culture, à l'inverse notamment de la Chine qui subit le poids pesant de son histoire doublement millénaire (et d'une histoire marquée et minée par les guerres de l'opium ne lui ayant pas permis de suivre le chemin de l'ère Meiji selon Kissinger dans "De la Chine") est largement co-construite et influencée par les pratiques extérieurs, notamment les États-Unis, l'ancienne Prusse, la France et la Grande Bretagne.
Il suffit d'observer l'histoire du management japonais pour saisir de quelle manière l'influence de Deming a été largement occultée par le concept du toyotisme et de la qualité totale. Le softpower japonais de la culture basé sur le "cool Japan" a néanmoins largement permis de diffuser une image positive d'un territoire haï en Asie pour ses crimes de guerre tout en agissant de concert avec la montée en gamme des produits japonais pour diffuser largement des bribes de culture à travers le monde, tout en contribuant à forger une image de pays de qualité, technologique et sérieux (La promotion dans le management du Traité des Cinq Roues en est l'un des exemples, à noter que l'ouvrage de Bénédict Ruth y a aussi beaucoup contribué...). Néanmoins, ce qu'il est intéressant de saisir est la spécificité d'un pays dont la culture s'est largement construite au contact d'autres nations, deux des plats les plus populaires, le "kare rice" et la "tempura" ne sont pas d'origine japonaise, de même, le karate provient d'Okinawa, territoire rattaché tardivement à l'archipel.
Une question se pose donc, au moment même où les grands champions de karate, judo, jiu-jitsu ne sont plus japonais, où un grand nombre de pays produisent des mangas et où les États-Unis et le Canada comptent parmi de grands éditeurs de jeux vidéos si ce qui était autrefois considéré comme particularité de la culture japonaise n'est tout simplement pas un bien mondialisé. Il suffit d'observer la manière dont les règles du Judo ont largement changé au contact des différentes fédérations pour observer l'influence mondiale décisive. De même, la Japan Expo au nom éponyme a certainement un contenu plus international que japonais (les cosplayers et les jeux vidéo les plus populaires étant dans le monde pour une grande partie non-japonais).

Natacha226 a dit…

L'exportation de la culture japonaise se fait très bien sur la chaine J-One.. le seul problème réside dans l'exclusivité de canalsat et numericable.Une déportation sur d'autres opérateurs permettrait à plus d'auditeurs de profiter des programmes japonais.
#natacha226

#Thierry226 a dit…

Etant fan de la culture japonaise, je passe un bon moment devant la chaine J-ONE ou je voudrais faire un focus dessus.


J-ONE c'est :
- Un minimum de 5 nouvelles séries inédites par an
- Une veille permanente sur l’actualité culturelle et sociétale japonaise avec le « J-News », ainsi que plusieurs magazines hebdo, pour tout savoir du manga, du cosplay, de la J-Pop, K-Pop, et de la high-tech.
-De la pop culture manga à J+1

Pour les passionnés :
Lundi 1er décembre à 16h25 sur la châine J-One, l'émission Asie Insolite, dédiée aux dernières tendances otakus, revient sur l'un des points majeur de la pop-culture japonaise : les animés.

#thierry226