Cela devait arriver.
Déjà, dans les années 1980, on avait proposé de cesser de regarder la télévision, d'organiser des jours sans télé, etc. La télé étant une drogue ("Plug-in drug", 1977), il fallait s'en désintoxiquer ! ("Unplugging the plug-in drug", 1987).
Maintenant, c'est au tour du jour sans Web, de la semaine sans Wifi, des soirées sans Facebook... National Day of Unplugging... Dénoncer l'addiction au Web... Enfin, une mission généreuse !
L'agence Dagobert a tenté un bilan des non-connectés et l'assortit de conseils pour la publicité. Elle distingue les non connectés par nécessité (économique ou technique), les non connectés par prudence et ceux qui ont rompu avec le Web. Pour ces derniers, la dé-connexion est le signe d'une lutte acharnée contre une pathologie. Les malades en traitement sont déclarés "digital detox". Symptôme dominant : la peur de manquer quelque chose : Fear of missing out (FOMO), une sorte d'angoisse, à moins que ce ne soit la peur que le manque ne vienne à manquer. D'ailleurs, l'expression FOMO ne vise pas que le Web. Dans ce symptôme, certains croient pouvoir identifier un désordre psychique (iDesorder) ; Dagobert y voit plus raisonnablement une tendance, un signe faible... Finalement, l'agence conseille le bon sens : ne pas en faire trop en ligne, ne pas communiquer seulement en ligne. Plaidoyer raisonnable pour un médiaplanning rationnel, pour un ciblage lucide et circonspect (comment toucher les non-internautes). La présentation (Digital Detox. Tendance déconnexion, février 2013, 62 p.) montre de façon convaincante comment des annonceurs exploitent cette tendance.
Notons que connaître le nombre des non-connectés n'est pas si simple à établir : non-connectés pendant combien de temps (au cours du dernier mois, la veille, etc.) ? Non-connexion au domicile ou hors domicile ? Non-connexion sur quel appareil ? Il n'est pas plus facile de compter les non-connectés que les connectés.
Notons encore que l'argument économique recoupe une tendance au désabonnement observée aux Etats-Unis (cord cutter et cord never) et qui semble prendre de l'importance en télévision et en téléphonie. L'hostilité à l'abonnement et à la dépendance économique qui s'en suit correspond peut-être à une évolution profonde du comportement des consommateurs. A vérifier.
Reste le plaisir snob du renoncement : "J'suis snob", chantait Boris Vian (1955) : "J'avais la télé, mais ça m'ennuyait, je l'ai retournée de l'autre côté, c'est passionnant" (cf. infra, 2:00).
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Ulysse et les Sirènes Stamnos attique à figures rouges - v.480-470 avant JC
Londres - British Museum
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2 commentaires:
L'étude de l'agence Dagobert ne semble pas avoir pris en compte un facteur important qui est celui du cumul des usages privés et professionnels. Le web étant un agrégateur puissant d'informations, que ce soit par les encyclopédies en ligne comme Wikipédia que par l'immensité des bases de données disponibles, sa consultation est indispensable dans un nombre considérable de métier, devenant ainsi un incontournable (voir inévitable). Hors, les moyens de communication interpersonnelle ayant fortement évolué avec une mobilité accrue, la question se pose des effets à long terme d'une exposition beaucoup trop importante à l'écran. La thèse de N. Carr, sur les effets de la sérendipité, de la navigation hypertexte soulève notamment cette question.
En effet, internet est devenu une drogue dont impossible de s'en débarrasser car aujourd'hui, internet c'est pas seulement juste un outil à usage privé mais aussi pour le travail surtout pour les métiers directement liés à internet. Il est possible d'arrêter la TV pour deux jours mais internet difficilement (peut être en vacances!).
Des études en Chine sur le problème de dépendance d'internet des jeunes montrent qu'il est important d'une déconnexion de temps en temps car ces jeunes deviennent trop dépendants et ne peuvent plus s'en séparer des réseaux sociaux ou des jeux en ligne. Cela peut provoquer des problèmes psychologiques à face à la société, des problèmes de communications avec l'extérieur. Les jeunes se ferment dans ce monde virtuel.
Face à ces problèmes, l'éducation des parents est un élément principal. Selon des statistiques, avec 100 millions d'internautes en Chine, il y a plus de 80% internautes qui ont moins de 35 ans. Ce problème est donc dû à un manque de capacité d'auto-contrôle des jeunes.
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