lundi 22 octobre 2018

Des questions pour Comcast, nouvel acteur média international


Quelle est la situation de Comcast après sa tentative infructueuse de rachat de Fox contre Disney et après l'acquisition de Sky en Europe. Nous avons repéré six questions essentielles.
  1. Hulu, que faire ? Vendre ou ne pas vendre les 30% que Comcast détient ? Le vente serait certainement bienvenue pour le désendettement. En revanche, cet actif minoritaire peut se révéler utile pour surveiller Disney qui en détient 60%, et pour ne pas lui laisser les mains libres de faire de Hulu un service de streaming VOD d'envergure, qui serait un redoutable concurrent pour les projets de Comcast (cf. Hulu vMVPD). Rester présent dans Hulu, c'est aussi conserver l'accès aux données collectées par Hulu auprès de ses 20 millions d'abonnés.
  2. L'image de marque de Comcast aux Etats-Unis est catastrophique. Il lui faut prendre garde qu'elle  ne contamine l'image de Sky en Europe. Comcast a communiqué sur son offre XFINITY (broadband) à un giga mais sa position quant à la neutralité du net, telle qu'elle apparaît en Californie, peut inquiéter grand public et actionnaires.
  3. Comcast avec Sky est devenu un acteur télévisuel international. Quelle sera sa relation à Netflix ou / et Amazon Prime Video, acteurs internationaux ? Comcast est à la fois un MVPD traditionnel et un fournisseur d'accès Internet majeur (broadband) qui distribue donc Netflix (tout comme Sky déjà, qui met Netflix en avant, cf. infra). Comcast et Netflix, frenemies en Europe comme aux Etats-Unis, contre Amazon, contre Disney ? Faut-il que Comcast se lance dans une concurrence frontale coûteuse et risquée étant donné la dynamique de Netflix et d'Amazon ?
  4. Si Disney ne peut se passer de Comcast, Comcast ne peut guère ignorer Disney. Relation compliquée que la bataille pour Fox a sans doute exacerbée. Comme MVPD, Comcast doit distribuer les chaînes et les stations de Disney contre rémunération (retransmission consent). Sky distribue des chaînes de Disney en Europe.
  5. Sur Sky, promotion de Netflix
  6. Développer un service SVOD mondial à la Netflix, comme l'annoncent aussi Disney ("Disneyflix") ou AT&T ("Warnerflix") ? Comcast en a les moyens et les contenus (Universal, NBC, telemundo, Sky, des chaines sportives...). Comcast peut également lancer des chaînes et des bouquets OTT. Notons que Sky / Comcast, pour assurer une distribution européenne, devrait remédier à son absence de France : quels alliances ou acquisition imaginer ?
  7. Développer FreeWheel (qui appartient à Comcast)... pour en faire un outil publicitaire international de gestion de la télévision connectée (programmatic). N.B. Disney est actuellement client de FreeWheel...

8 commentaires:

Corentin Durrleman a dit…

Intéressant de voir comment Comcast s’est acheté une arme contre Netflix en s’offrant Sky pour la bagatelle de 33 milliards d’euros.
Bien que son image soit dégradée aux Etats-Unis – notamment depuis l’affaire Tutanota en mars 2018 qui a rendu inaccessible à sa clientèle son service de messagerie pendant presque 24h-, Comcast, en s’offrant aujourd’hui le luxe de prendre le contrôle du premier diffuseur européen de TV par satellite, s’apprête à générer des revenus toujours plus importants et développer ses contenus.
Et quels contenus ! Comcast c’est NBC, le studio Universal, les productions Sky… la concurrence s’accroit…sans compter WarnerMedia (WarnerBros, CNN, HBO, Cartoon Network, TNT, Boomerang…) sur le point de lancer son propre service de vidéo en ligne fin 2019.
Car si tous les yeux sont rivés sur Netflix et Amazon depuis quelques années, le rapport de force risque bien de s’inverser. La fin de l’hégémonie Netflix est-elle programmée ? A suivre…

Leconte Charles a dit…

Maintenant que Disney est proche de posséder 60% de Hulu, les 30% de Comcast vont devenir une formalité, et de ce fait Comcast n'aura que peu de contrôle sur cette société. De plus, Comcast est très probablement à la recherche de liquidités pour couvrir le récent achat de Sky.
Il est intéressant aussi de noter que Disney développe actuellement son propre service de streaming, qui sera lancé l'année prochaine. La manière dont la société gérera cette nouvelle plateforme en relation avec Hulu n’est pas encore à ce jour précise.

Laloux Marion a dit…

J'ai eu du mal à cerner les différents éléments (points forts ou pas) de Disney vs Comcast : comprendre leur intérêt de fusionner ou de travailler ensemble pour une ambition commune ou non.
Par contre, je trouve très intéressant la réflexion sur Netflix et sur l'Europe. Pour résumer, on remarque que les acteurs évoluent et s'entremelent ensemble et on attend avec impatience comment toutes ses interactions vont évoluer dans le futur.

Gabriel Sfeir a dit…

Sur papier, il serait logique pour Comcast de vendre ses 30% de Hulu à Disney.

Toutefois, en conservant Hulu, Comcast pourrait profiter de plusieurs leviers positifs tels que des retombées financières non-négligeables via les licences de programmes NBC sur Hulu ou encore l'accès aux données de Hulu, qui permettrait à Comcast de mieux comprendre les tendances du marché et d'en anticiper les potentiels dangers.

Un autre avantage serait de permettre à Hulu de ralentir le développement de l'offre de SVOD/OTT de Disney, qui met en place sa plateforme "Disney Play" en parallèle, et qui n'osera peut-être pas investir autant que souhaité pour développer Hulu si un opposant lui fait face au conseil des actionnaires.

Comcast aurait donc tout intérêt à conserver ses parts dans Hulu, quitte à ne pas bénéficier des indéniables avantages qui résulteraient d'une vente à Disney. Dans ce cas, le défi pour Comcast sera de trouver d'autres moyens d'alléger la dette contractée suite au rachat de Sky pour près de 40 milliards de dollars.

Louise Goin a dit…

Article très intéressant, qui pose aussi la question de cette multiplication de nouveaux "Netflix". Si aujourd'hui 2 acteurs se partagent l'affiche (Netflix et Amazon dans une moindre mesure), il est possible d'imaginer d'ici 2020 une dizaine d'offre SVOD. Il sera intéressant de voir alors comment ces acteurs comptent se démarquer et attirer des utilisateurs qui auront déjà plusieurs abonnements. D'ici 2023, le cabinet anglais Digital TV Research estime que le poids de la SVOD en France atteindra 44% du marché vidéo, de quoi s'interroger également sur l'avenir des médias historiques qui subissent déjà les répercussions des nouveaux modes de consommation des contenus.

Unknown a dit…

Les annonces de lancement de plateforme SVOD se multiplient depuis quelques temps. Après Disney, c'est Warner et Apple qui s'y mettent. Mais comment réagiront les consommateurs devant la multiplication des offres et des abonnements à payer ?
Netflix avait réussi à capter une grande partie des consommateurs avec une offre pertinente mais d'autres plateformes sont apparues depuis (Hulu, Amazon). Résultat ? Le téléchargement illégal repart à la hausse.
En effet, les plateformes se font la guerre pour l'exclusivité des contenus et il devient difficile pour les consommateurs de suivre. La plupart des utilisateurs se contente d'un ou deux forfaits et pirate le reste.
Cette course à l'exclusivité et la production de contenus originaux risque donc d'alimenter le téléchargement illégal. Disney et Warner pourront compter sur un catalogue assez riche, mais cela suffira-t-il à capter assez d'utilisateurs ?

Léa Bernabeo a dit…

Les nombreux rachats mutuels entre ces géants des médias posent la question du monopole de ces acteurs sur le marché. Comcast apparait comme une force indéniable sur ce marché, et semble vouloir s'imposer en Europe face à d'autres acteurs déjà bien installés (Netflix, Amazon...). Petit à petit, le monopole d'acteurs comme Comcast centralise toutes les offres en une seule, à la manière de la stratégie d'Amazon... Doit-on craindre une offre de plus en plus uniformisée ? Va-t-on un jour voir débarquer Comcast en France ?

Mathieu Le Cossec a dit…

Article très intéressant !

Le rachat de Sky UK a permis à Comcast de se doter d'un formidable portefeuille de droits sportifs. Mais tout l'enjeu sera de réussir à les conserver.

L'émergence des géants du numérique sur ce marché (Amazon a récupéré 40 matchs de Première League en Grande Bretagne) entrainera une inflation certaine du montant des droits.

Comcast réussira-t-il a relever le défi ? Rien n'est moins sûr face à la puissance de ses nouveaux concurrents.