La manie d'exhiber de l'anglais partout à tout prix fait des ravages dans les pays non anglophones. Tout - les enquêtes déclaratives, la fierté, les illusions- conduit à en sous-estimer les conséquences.
L'agence allemande endMark a publié les résultats d'une enquête sur la compréhension de slogans publicitaires diffusés en anglais en Allemagne : 75% de la population les comprend de travers ou pas du tout (enquête auprès de 1014 personnes de 14-49 ans, vivant dans les très grandes villes, la cible des slogans). Et pourtant, l'enquête porte sur l'Allemagne où l'enseignement de l'anglais n'est pas le pire, où la proximité linguistique avec l'anglais est plus grande. Que donnerait une telle enquête en France ?
Pareille enquête permet de rompre avec la sociologie spontanée des voyageurs (amateurs ou professionnels) qui concluent de deux ou trois brêves expériences, eux-mêmes n'étant pas anglophones et ne parlant pas la langue locale : "tout le monde parle anglais" (au choix : en Chine, Scandinavie, Allemagne, aux Pays-Bas, etc.).
Comment la publicité en est-elle arrivée là ? Tout y contribue : l'incorrigible ethnocentrisme de certains milieux publicitaires périphériques (non américains), l'internationalisation des campagnes, c'est à dire leur américanisation, la mondialisation des marques... Notons qu'aux Etats-Unis au contraire, le marché de la publicité et des médias est extrêmement attentif aux compétences langagières de la population (compréhension orale, écrite ; communication personnelle, familiale, professionnelle ; sensibilité aux acents). L'interprofession y multiplie les enquêtes... prend les résultats en compte pour les créations, mais aussi (non sans difficultés) pour établir les quotas de recrutement pour les panels, etc.
Au vu des résultats de cette enquête, pré-tester la compréhension des slogans et des textes publicitaires s'avère indispensable. La compréhension est au fondement de l'efficacité d'une campagne.
Profitons-en pour élargir le débat aux compétences langagières.
- Des tests honnêtes de compréhension de la langue nationale nous vaudraient sans doute de belles surprises. Les entreprises font chaque jour l'expérience de la situation de l'expression écrite chez des personnes qu'elles emploient, y compris chez des personnes diplômées occupant des postes d'encadrement. Le test de rédaction pour le recrutement des cadres ne saurait tarder à s'imposer. Avec Internet, on écrit au moins autant qu'avant, et plus vite, souvent sans relecture et que ce que l'on écrit est beaucoup plus largement diffusé, propagé.
- L'enseignement, à tous les niveaux, devrait distinguer enseignement de la littérature et enseignement de la communication (écrite, orale, etc.) et ne pas renoncer à l'un pour l'autre.
- Osons imposer et non seulement proposer l'apprentissage de la langue nationale aux immigrant(e)s, ce qui n'implique pas un renoncement à la langue maternelle, qu'il faut maintenir et enrichir, pour des raisons personnelles évidemment, mais aussi et surtout pour des raisons économiques. Cf. "Langue, diplômes : des enjeux pour l'accès des immigrés au marché du travail" (Olivier Monso, Frnçois Gleizes, INSEE Première, N° 1269, Novembre 2009). Que l'on n'enseigne pas - ou si peu - l'arabe en France est désolant.
- Méconnaître la méconnaissance des langues est à court terme plus commode. Avons-nous intérêt à (nous) dissimuler la faible rentabilité des investissements scolaires dans l'apprentissage de la langue nationale d'abord, et des langues étrangères ensuite ? Le travail que l'institution scolaire n'a pas accompli avec l'argent public, les entreprises doivent l'assurer à sa place, ou en pâtir. C'est un impôt de plus sur l'entreprise, payé deux fois par les citoyens. Politiques de Gribouilles.
Loi Toubon N° 94-665 (cf. article 2 de la Constitution)
Circulaire du 19 mars 1996 en application de la loi Toubon
Le bilan 2009 "Publicité et langue française" publié conjointement par l'Autorité de Régulation Professionnelle de la Publicité (ARPP) et de la Délégation générale à la langue française et aux langues de France (DGLFLF).
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2 commentaires:
"Everybody THINKS they speak English" is a far more suitable title for this post.
Que donnerait une enquête semblable en France ? Why try? They’re so delusional they wouldn’t believe the results anyway. Furthermore, anyone who thinks “footing”, “lifting”, and “sweetshirt” are English words should be exempt of all assessment.
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