lundi 9 novembre 2009

Visiteur unique : les démons de l'analogie

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La notion de "visiteur unique" ne fait pas l'unanimité lorsqu'il s'agit d'apprécier la place des médias sur Internet. Pourtant, c'est une notion banale en média, sous la dénomination d'audience cumulée. Pourquoi sa manipulation sur Internet pose-t-elle problème ?

Définition
Revenir à l'audience cumulée et à la couverture à au moins 1 contact, pendant une période donnée, pour un segment identifiable de population (cible) : ce sont des visiteurs uniques.
A partir de là se composent les agrégats adéquats. Par exemple, suivant le rite procterien, la couverture cumulée à au moins 3 contacts, au bout d'une semaine de campagne. Ou encore, pour une audience télévision, sa sensibilité à la durée de contact (1 seconde / 1 quart d'heure) selon des durées de cumulation des contacts (les premières mi-temps de match de foot avec l'équipe de France).

Remarques
  • Pour être opérationnelle, cette notion de visiteur unique doit préciser la période de référence, durant laquelle le visiteur est considéré comme unique, et la courbe de cumulation des contacts. Au bout de combien de temps la courbe sature-t-elle parce que le média ne recrute plus de visiteurs nouveaux ? A quel rythme s'effectuent les revisites ? 
  • Au sens strict du terme, un visiteur unique ne présente guère d'intérêt, et surtout de sens. C'est peut-être quelqu'un qui est venu par erreur, s'est trompé en configurant sa recherche (artefact des moteurs de recherche, du référencement naturel ou artificiel). Quelqu'un qui ne reviendra pas, une fausse conquête. Ainsi, lorsqu'une radio proclame qu'elle a tant de millions de visiteurs uniques par mois de plus qu'une autre, pour mieux apprécier cette audience, et ne pas trébucher sur les pièges du communiqué de presse, il faut en revenir à la fidélisation. Combien de réguliers (nombre de visites par mois, sur combien de jours différents) ? Quelle durée d'écoute par auditeur DEA) ? Combien parmi ces centaines de milliers de visiteurs uniques sont restés quelques secondes, n'ont rien écouté, ne reviendront jamais ?
  • Un visiteur unique n'est intéressant que lorsqu'il n'est plus unique, lorsqu'il devient régulier, tout comme un client d'hyper. Nous retrouvons la notion canonique d'effective frequency, seuil de répétition en-deçà duquel la communication est inefficace, au-delà duquel on commence à gaspiller. Toute l'optimisation d'un plan consiste d'abord à déplacer la distribution des contacts vers un niveau optimum (défini par le client, tenant compte de la création, du capital de notoriété accumulé, de la mémorisation, etc.) à n contact (3, 4, 5) dont se déduit le capping.
  • Plus longue la période de référence, plus élevé le nombre de visiteurs uniques égarés, visiteurs de peu d'intérêt (audience cumulée à un contact, strictement). D'où l'importance d'une référence temporelle pertinente (filtre) : pour un quotidien la réferénce mensuelle ne l'est guère. Il faut plutôt, dans ce cas, que le média diffusé sur Internet se rapproche de notions classiques comme la lecture du numéro moyen (LNM) ou la lecture dernière période (LDP, la veille pour un quotidien). L'approche "pages vues / visites" que pratique l'O.J.D. rend compte plus certainement de la puissance d'un site média, mais tout ramener au mois est moins convaincant.
  • On ne devrait jamais, pour l'interprétation d'une audience, isoler la courbe des visiteurs uniques de celle des visiteurs et des visites à n contacts (2, 3, 5...).
  • Quand on annonce, par exemple, sans plus de précision, que sur Internet les quotidiens perdent des visiteurs uniques sans spécifier la définition de ces visiteurs uniques en fonction du média, on ne sait pas ce que l'on dit, ni ce qu'il faut comprendre. La définition devrait inclure la durée de référence pour laquelle on estime cette unicité pertinente mais aussi le lieu origine de cette unicité (domicile, bureau, université, téléphone, etc.) ou plusieurs de ces lieux à la fois (ou, au moins, préciser, c'est souvent le cas, que l'on n'en sait rien). Notons, en passant, que le lieu d'origine de l'audience se pose aussi en télévision (domicile, hors domicile, en mobilité, etc.).
Les sites média ont un rythme "naturel" de consommation, lié à l'événement (ce qui est construit comme tel) que ne peuvent ignorer et suspendre les comparaisons. Le "visiteur unique" ne permet pas d'apprécier la puissance utile d'un site média, ni sa puissance rédactionnelle, ni sa puissance publicitaire. Les comparaisons, les analogies, forcément réductrices, permettent  quelques "spécialistes en généralités" d'avoir opinion sur rue, mais pas de travailler.
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1 commentaire:

isabelle le roy a dit…

TOP!!! une remarque, pour la tv pas de probleme actuellement pour l'origine de l'audience, ce n'est, helas, que du domicile.