lundi 17 octobre 2011

Le kiosque, un média dans la ville

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Le kiosque à journaux occupe une position unique sur le marché des médias, mais aussi, puisque pour une fois la métaphore dit juste, dans le "paysage" des médias. Le kiosque, média centenaire, c'est un média qui vend des médias (la presse), un média de médias analogiques.
Avec 745 kiosques dans 165 agglomérations, MediaKiosk assure aux annonceurs une large dispersion géographique. Jean-Paul Abonnenc, qui dirige MediaKiosk, souligne la croissance continue de ce réseau mixte, au format moderne, associant distribution et affichage. Média au coeur des villes, le réseau MediaKiosk est, par construction, en affinité avec la population urbaine et active.
Une étude a été conduite par Be Consulting à la demande de MediaKiosk (enquête en ligne auprès de 500 personnes, échantillon recruté par Toluna dans deux unités urbaines, Paris et Marseille). L'originalité de la méthodologie tient aux modalités de l'interrogation, sorte de test projectif à partir de photographies que les enquêtés associent ou non aux kiosques. L'objectif assigné à cette étude était de rendre compte de la triple réalité des kiosques : points de vente, mobilier urbain et supports d'affichage publicitaire. Il s'agissait d'approcher et comprendre la perception du kiosque par les clients, les passants, les habitants... Le kiosque "vécu".

Kiosque parisien Porte de Saint-Cloud (octobre 2011)
  • Tout d'abord, le kiosque est l'occasion d'un contact personnel. Alors que la relation commerciale est de plus en plus souvent confiée à des machines (distributeurs de toutes sortes) et à des algorithmes simulant la personnalisation, le kiosque est un lieu rare de relation sociale, familière, comme l'épicerie, la pharmacie ou la boulangerie. Le kiosque participe de la qualité de la vie en ville. 
  • Sur le chemin des habitudes, le kiosque est un point d'ancrage et de repère quotidien dans la ville. Il en est aussi un décor familier, changeant au gré de l'actualité, au gré des affiches et des couvertures de magazines. 
  • Près de la moitié des affichages sur les kiosques concerne la presse ; pour ces annonceurs captifs, le kiosque est une sorte de PLV grand format, les affiches énonçant ce qui est vendu. La seconde moitié des affichages revient à des marques donnant à voir et à rêver, la plupart d'entre elles concernant le cinéma, la culture, y compris numérique.
  • Les kiosques sont à la fois tous semblables et uniques, mobilier dont la structure commune s'adapte progressivement à chaque quartier et à son activité économique majeure (bureaux, tourisme, voyage, etc.). Ni snobs, ni prétentieux, ni vulgaires, ils s'intègrent dans leur environnement. 
  • Quelles perspectives dégager pour les kiosques ? Etendre les horaires. Elargir la gamme des services du quotidien, de la proximité. Mettre des fleurs, des friandises, des boissons à l'éventaire des kiosques ? Sans doute, mais, à mon avis, rien ne sera plus efficace, pour alimenter les kiosques en clientèle régulière, qu'une presse quotidienne et hebdomadaire locale puissante. Indispensable produit d'appel.
Comment les kiosques passeront-ils au numérique ? Ce n'était pas l'objet de l'étude, mais elle invite à y penser. L'arrivée massive d'écrans est inéluctable, comme dans les centres commerciaux, comme dans les gares... Des écrans pourraient apporter un espace pour donner envie de lire la presse, d'en télécharger des éléments "à la demande" comme on achète la télé en VOD, la payer (NFC). Même quand le kiosque est fermé, la vente doit continuer. L'interactivité doit être au service du commercial et fournir des analytics opérationnels. S'inspirer de ce que la grande distribution met en place pour les smartphones (applis, etc.). Il faut proposer le Wi-Fi et l'appli adéquate. Il faut pouvoir interroger son smartphone (applis de type Siri, etc.) et qu'il indique où acheter Virgules, La Voix du Nord ou Télérama, jusqu'à quelle heure, etc. Mais surtout éviter de "donner" à l'extérieur ce que l'on vend à l'intérieur (selon un modèle fatal suivi par une partie de la presse qui "donne" sur le Web ce qu'elle vend dans les kiosques).
La question des écrans n'est pas triviale. Implanter des écrans LCD en pleine rue, fonctionnant par tous les temps, suppose de concevoir des systèmes ad hoc, résilientsintégrant soigneusement dalle, électronique et conditionnement.
Importante pour les clients de MediaKiosk, éditeurs et annonceurs, cette étude de Be Consulting constitue aussi une involontaire et précieuse réflexion sur un urbanisme déshumanisé, sur nos villes qui changent trop vite. Gigantesques "machines à habiter" les "temps modernes", peuplées en grande partie d'immigrés venant de plus ou moins loin, d'autres provinces, d'autres continents, les grandes villes ont besoin de regagner un peu d'humanité : "La forme d'une ville // Change plus, hélas, que le coeur d'un mortel" observait Baudelaire qu'inquiétait déjà le Paris haussmannien naissant. Nous habitons nos villes autant qu'elles nous habitent.
Le kiosque représente un point fixe, souvent chaleureux, dans un univers urbain mouvant : le service public rendu par cette entreprise privée est indéniable. On sait que Presstalis revend sa participation dans MediaKiosk (Lagardère étant déjà sorti) et l'on comprend que JCDecaux s'intéresse à cette belle entreprise, prometteuse, qui semble le nec plus ultra du mobilier urbain.

7 commentaires:

Delphine ABDOU-FITTON a dit…

Le passage progressif au numérique semble inéluctable dans tous les points de vente, même les plus traditionnels, et les kiosques ne font pas figure d'exception. Comme cet article le suggère, pour ne pas que ce passage au digital se traduise par la disparition du métier de vendeur kiosque à journaux, il faut que les nouvelles solutions proposées soient complémentaires aux services d'ores et déjà apportés en physique. Par exemple, en assurant une sorte de permanence lorsque les kiosques sont fermés, en permettant la commande ou le renseignement sur les publications à venir.
De façon plus générale, il parait important de préserver la contribution humaine des métiers traditionnels en l'enrichissant par le digital, au lieu de la remplacer par ce dernier.

Julie Hesnault a dit…

Je rebondis à votre invitation à songer au numérique.
On peut aussi parler de l’avenir des quotidiens français comme France Soir qui a décidé de se séparer de sa version papier pour du 100% Web. En effet, le 1er janvier 2012 France Soir ne sera plus jamais présent en kiosque. Il faut noter que ce quotidien est le 1er à prendre le virage du 100 Web. A quand les prochains ? La Tribune avait déjà fait l’expérience d’arrêter la diffusion sur le papier au profit du Net, mais uniquement le temps d’un été. Les raisons de ces mutations sont bien évidemment financières.

On pourra aussi parler d’Apple qui a dévoilé son « kiosque » numérique qui permet de s'abonner à des magazines et de les recevoir directement en arrière-plan sur sa tablette iPad ou sur son iPhone. Mais la presse française n’y sera pas présente car elle le boycott à cause des conditions commerciales d’Apple qu’elle considère comme « inacceptables ».
Affaire à suivre...

Céline CMI a dit…

J'aime beaucoup l'idée que le kiosque à journaux est un peu comme un repère dans le flux ininterrompu de la vie citadine; je n'avais jamais pensé à cette approche. Ceci dit ce n'est pas l'objet de mon commentaire.

Ce qui est vraiment à noter ici je pense, et vous ne l'évoquez que très brièvement (peut être serais-ce l'objet d'un prochain article?!)c'est le fait pour un magazine/journal... de proposer un contenu différent sur papier et sur un média plus digital. En effet, vous parliez dans un précédent article du devenir de la presse papier, et je pense que cette façon d'agir serait un bon moyen de freiner une transition trop brutale, et de maintenir un intérêt fort pour un média papier qui ne serait que complété par le digital.

Julie Hesnault a dit…

Pour information, contrairement aux idées reçues, les jeunes sont de grands acheteurs de la presse magazine en kiosque (66%, indice 105).(source AEPM)
Le média magazine est passé à l’offensive avec une grande campagne construite avec la complicité de l’agence BETC Euro RSCG. Cette stratégie de comm a été effectuée en 3 temps.

Raluca Mocanu a dit…

J'ai trouvé très agréable cette article et je vous en remercie parce-que vous avez souligné certains aspects importants.
Je voudrais remarquer l'aspect du contact personnel qui je pense que c'est tres importante aux kiosques. Il y a beaucoup de gens, comme moi, qui craignent qu'il seront enlevés tous les habitudes classiques et remplacés par le numérique.
Il faut vraiment garder cette tradition typique d'avoir une situation de vente personnalisée aux kiosques - une petite conversation avec la vendeuse ou le vendeur pour nous aider décider quelle revue acheter ou quelles sont les plus acides nouveautés de la journée. Si non, on peut simplement aller prendre un journal quel que soit dans des boites situées dans la rue, mais c'est assez impersonnel et triste.
Toutefois, il convient d'établir très précisément la cible des kiosques, les personnes qui ont l'habitude d'acheter leurs journaux d'ici. Et avec la transition au numérique aussi des kiosques, je pense que cette cible peut être étendue.
Pour finir, je veux ajouter que à mon avis, le kiosque fait partie de l'arrière-plan de la ville touristique du Paris. Les kiosques au bord de la Seine avec leurs architecture spécifique de ''mobilier urbain'', donnent un aspect typique parisien et ajoutent de la qualité à la vie urbaine.

Simona Candrian a dit…

C’est vrai que les kiosques donnent un charme spécifique à une ville. Leur apparence diffère de chaque pays ou quelquefois de chaque ville et ils marquent souvent un point d’orientation pour les touristes. La présentation des journaux est importante pour attirer les gens, mais on achète de moins en moins vraiment des journaux (je suppose que les kiosques produisent beaucoup de vieux papier). Les kiosques souffrent de la numérique et la vente des journaux se diminue. À cause de ça, Valora la plus grande chaîne de kiosque en Suisse, est en train d’élargir son assortiment (voici l’article http://www.nzz.ch/aktuell/wirtschaft/wirtschaftsnachrichten/presse-schwund-belastet-valora-1.17513608). À mon avis, cet élargissement est très important pour les kiosques pour survivre. Les journaux sont importants pour l’image et la présentation d’un kiosque mais on ne payera pas les factures avec leur vente.

Une chose que m’a surpris dans vos commentaires, est la situation du vente personnalisée. J’ai jamais eu une petite conversation même pas un sourire du vendeur, ici en Suisse. Apparemment ils sont plus sympas à Paris.

Patrizia Lamprecht a dit…

Le kiosque- le lieu où on achète des billets pour les transports publiques, des douceurs, des cigarettes, des journaux et beaucoup plus. Le kiosque n’est pas seulement le lieu d’achat, mais aussi un point d’orientation, une partie de la ville. On doit vraiment se demander si dans quelques années, les kiosques existent encore dans la même forme comme aujourd’hui. Les médias se déplacent vers l’internet. De plus en plus s’établissent des kiosques en ligne (par ex. http://www.online-kiosk.ch). Va cette tendance augmenter dans la future ? Ce serait bien dommage parce que je pense que les kiosques sont un élément base de chaque ville, un lieu de contact. On devrait trouver des autres solutions, comment par exemple intégrer des écrans dans les murs du kiosque (où on peut p.ex. voter quel journal va apparaître la semaine prochaine dans le kiosque), ou les médias devraient produire un contenu différent dans l’internet et sur le papier.