Nietzsche philologue
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Friedrich Nietzsche, *Traité appelé La joute d'Homère et Hésiode*, *Certamen
quod dicitur Homeri et Hesiodi*, E codice florentino, Les Belles Lettres,
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dimanche 30 novembre 2014
Technologies, opium du peuple ?
Humanoïde : le magazine trimestriel coûte 5 € (abonnement 16,9 €), 100 p., diffusion Presstalis. Editeur Presse Non Stop.
"A contresens sur l'autoroute de l'information", promettait le n°1, plutôt "méfiant" envers les technologies (juillet 2014) ; "La technologie est l'opium du peuple", assène le n°2 (octobre 2014), plus conciliant mais avec humour. Le titre cherche sa voix et son positionnement, son lectorat.
"Humanoïde" désigne ce qui a les apparences humaines. Allusion aux robots et automates (cf. "Googlenator ou Inspecteur Google"), à l'intelligence artificielle (cf. "Siri, Google Now et Cortana, la voix cassée des intelligences artificielles", dans le n°1) ? Voilà pour le contenu.
Pour la ligne éditoriale, une proposition provocatrice l'éclaire : en quoi la technologie est-elle l'opium du peuple, comme l'affirme le n°2 en sous-titre ? Voici une hypothèse féconde et unificatrice pour traiter du numérique en ses multiples manifestations. Pour Marx, "l'opium du peuple" était la religion, "soupir de la créature opprimée", "protestation contre la misère réelle" (Introduction à la critique de la philosophie hegelienne du droit, 1844). La technologie numérique peut retrouver nombre de ces sympômes dans un tel tableau clinique. Déjà Calvin and Hobbes, la BD, avait signalé que la TV, mieux encore que la religion, était l'opium du peuple (cf.infra. Merci ZeM pour cette référence).
A voir l'utilisation constante des smartphones, en toute circonstance, par tout un chacun, on peut s'interroger : quels besoins remplit cette sempiternelle connexion, quel rôle satisfait cette communication rituelle. Je connecte donc je suis : cogito numérique. Comportements religieux ? Soupirs des créatures opprimées ? Le mobile comme époux/se numérique tout comme l'automobile fut l'époux/se mécanique ? Folklore de notre monde (cf. Marshall McLuhan, Mechanical Bride: Folklore of Industrial Man, 1952) ?
Au plan politique circule l'idée, mais on n'y croit guère, que la technologie résoudrait tous les problèmes : transport, éducation, sécurité, économie, santé, emploi... Les paradis d'intelligence artificielle seraient proches. Is the singularity that near? Tel héros, tel people de l'économie numérique, tout auréolé à la une, "va-t-il sauver l'humanité ?" (n°2) demande le magazine, ironique à juste titre : avec le numérique, la tentation du prophétisme n'est jamais loin. Après l'article sur Elon Musk (n°2), excellent mais qui pourrait prendre plus de distance avec le journalisme people et sa réduction psychologiste des entreprises, on attend au tournant un article sur Uber...
Comme toujours le papier accompagne le numérique, comme un contrepoint. Déjà les anciennes techologies, radio, cinéma, TV, jeux vidéo avaient donné naissance à des dizaines de magazines papier grand public. Le magazine papier depuis longtemps est un média d'accompagnement des médias.
"Pas seulement le magazine papier de la société numérique, mais un magazine de société sur les nouvelles technologies" (édito du n°1), ceci positionne résolument le magazine comme un miroir où l'époque se regarde et se mire. Voici l'engagement de la rédaction ; allez savoir ce qu'est un "magazine de société" (en est-il d'autres ?). Comprenons généraliste, pas spécialiste ; nécessité pratique d'obéir aux classification marketing, de situer le titre sur les linéaires encombrés... Référencement.
La structure rédactionnelle ne varie pas d'un numéro à l'autres. Cinq parties : actualité, "décryptage" (sic), technobsession, hygiène numérique, objetisation. Une couleur à la une, un portrait aussi. Un photographe pour chaque numéro, belle idée.
Humanoïde est également disponible en version numérique, en ligne, sans appli.
Le magazine est agréable à lire, à feuilleter. Sa manière de prendre les problèmes demande de prendre son temps, douter, dérouiller les clichés du moment, langagiers ou visuels, pièges de l'actualité, qui freinent et énervent la réflexion. Sortir du credo intéressé des spécialistes pour faire voir la "grande image" où les technologies numériques prennent leur sens.
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4 commentaires:
Nombreuses sont les personnes, entreprises qui prônent l'utilisation croissante des nouvelles technologies partout, tout le temps. Tout le monde expose d'abord les avantages apportés par cette connexion permanente, peu d'entre eux relativisent et analysent cette "sempiternelle connexion" d'un oeil avisé. Evidemment que l'adoption des progrès technologiques par la société 2.0 (voire 3.0 avec les objets connectés) fait marcher une bonne partie de l'économie, et révolutionne notre quotidien d'une certaine manière. Cependant, nous avons basculé dans l'excessif au point de ne plus pouvoir se passer de cette connexion permanente. Ceci est d'autant plus vrai pour les réseaux sociaux. «Facebook, c'est comme un frigo, tu sais qu'il est vide mais tu vas vérifier toutes les 10 minutes... ». Cette phrase traduit bien la perte de temps folle que peut occasionner l'addiction au numérique. Un magazine qui prend du recul est intéressant. Humanoïde captera probablement l'attention de toutes les personnes qui utilisent la technologie avec modération, celles qui sont addictes mais conscientes de ses effets néfastes. Le magazine doit garder une position conciliante, la technologie faisant partie intégrante de notre quotidien. Il n'y a plus de retour en arrière possible.
Je pense que l'opium du peuple se situe plutôt au niveau des contenus : le terminal/médium ne fait qu'améliorer le confort d'accès. En effet, si les technologies gagnent en puissance dans notre quotidien (il suffit de voir le nombre de personnes accrochées à leur smartphone dans le métro), ce sont surtout la quantité ET la qualité des contenus qui font qu'on s'y attarde autant.
Opium du peuple ? Non c'est le contenu et comment va être diffusé ce contenu. Le magazine "Humanoïde" est un nouveau trimestriel qui parle de High Tech mais que l'on retrouve curieusement dans les kiosques dans "nouvelle presse masculine". Il ressemble et traite le même contenu que le magazine américain "Wired", LA référence international dans la presse High Tech. Mais "Humanoïde" a quant à lui un ton beaucoup plus décaler, drôle. #marion226
Il est intéressant de voir que le papier influence toujours la toile.
A l'heure ou dit-on que le papier est en crise, on voit fleurir toute sorte de magazine
Concernant la position d'"Humanoïde" sur "La technologie l'opium du peuple", je pense que nous avons encore du temps devant nous.
Comme le soulignent mes camarades, ce n'est pas tant la technologie qui est l'opium du peuple mais plutôt le contenu, l'offre qu'elle propose.
Son omniprésence, nous fait peut être la comparer à l'opium du peuple ou à la religion, mais nous pouvons, cas de force majeur ou non, nous en passer. Bien qu'il serait difficile aujourd'hui d'imaginer un retour en arrière.
N'oublions pas le contrôle que l'ICANN a sur Internet et les enjeux qui en découlent.
Cette "opium" pourrait justement bien partir en fumée.
Manuëlla226
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