Jean-Louis Fabiani, La Sociologie. Histoire, idées et courants, 223 p., Lexique
Voici un excellent manuel de sociologie ; il a été produit par Jean-Louis Fabiani. C'est un manuel pour les débutants mais aussi pour les plus vieux, anciens débutants, qui peuvent y trouver de quoi remettre en chantier leurs outils de travail, les plus courants et les plus subtiles, et abandonner leurs idées un peu vieillies voire, pour certaines, complètement obsolètes.Le chapitre 10 ferme le livre avec l'enquête et "les outils pour analyser et comprendre". D'abord, il peut sembler qu'il n'y ait pas d'outils sociologiques a priori, que tout peut le devenir. Ensuite, l'enquête et les différents outils traditionnels de la sociologie sont évoqués, mettant en évidence leur rendement mais aussi leur progressive obsolescence, trop souvent oubliée. Cette partie est le plus riche mais aussi la plus désespérante pour la sociologie car les méthodes ont mal vieilli. Sans doute peut-on attendre des outils et méthodologies numériques, entre autres, des renouvellements radicaux.
Le livre est on ne peut plus sérieux, richement documenté, les références récentes complétant les développements plus classiques. Et, l'auteur ne manque pas d'humour dont il pigmente ses propos, discrètement. Ainsi parle-t-il de simple garniture idéologique pour distinguer les thèses de Pierre Bourdieu et de Talcott Parsons (p. 41) et pour souligner leur "évidente parenté". Et de l'ouvrage de Bruno Latour (Changer de société, refaire de la sociologie) son commentaire est sec : " refaire de la sociologie n'est pas vraiment son objectif ; il s'agit plutôt d'en faire, enfin, pour la première fois".... Et l'auteur se moque aussi de ceux qui criaient "CRS! SS!" en 1968, si peu historiens, si piètres sociologues, mais tellement à la mode.
Le chapitre, en annexe, intitulé "Quelques mots de la sociologie" pourrait bien évidemment être beaucoup plus développé ; des concepts manquent mais l'essentiel est présent, et qui aidera bien des lecteurs à remettre leurs idées en place. Jean-Louis Fabiani fait le ménage et revient, en actes, sur la conclusion de son ouvrage. J'en retiens "l'impératif de description" (p. 211) qui remet en questions tous les grands concepts de la sociologie et de "ce que nous appelons, plutôt vaguement, le monde social" ; encore une fois l'ironie de Jean-Louis Fabiani qui revendique finalement "de contribuer à l'expansion dans la société d'une sorte de distance critique à l'égard des affirmations les plus péremptoires qui y circulent, et de ne jamais renoncer à chercher à comprendre". Heureux projet. Les théories, les notions de la sociologie, oui, mais jamais sans l'ironie qui en est une hygiène constante.
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