lundi 16 février 2009

5 mn par jour "à la recherche du temps perdu"


DayLit détaille la littérature en toutes petites tranches, en miettes même. 1075 épisodes, 5 mn par jour durant trois ans pour La Recherche. Proust à dose homéopathique.
Le principe de DailyLit repose sur un syllogisme imparable : on lit ses emails, mais on ne lit pas de livre, ergo il faut publier les livres en emails (ou flux RSS) pour qu'ils soient lus.
Des romans japonais ne sont-ils pas déjà publiés sur téléphone, commentés par les lecteurs via SMS dont les textes sont intégrés dans la version papier. Ces sortes de soap operas deviennent des "best sellers". 
Et puis il y a aussi les livres audio (audio books) pour iPods et embouteillages. Et même des vidéos de 12 secondes sur iPhone (il y a une appli pour cela ! "Why only 12 seconds? Because anything longer is boring").

A cette distribution en miettes, il existe d'honorables précédents. Balzac publia nombre de ses romans en feuilletons. Marx accepta pour la traduction française (1872) de publier Le Capital en "livraisons périodiques" : "Sous cette forme l'ouvrage sera plus accessible à la classe ouvière" ! Pour adresser ses lettres, Mallarmé écrivait des "Récréations postales" (1892) en forme de quatrain. En 1948, France-Soir publia "Autant en emporte le vent" en feuilleton. Et Jauffret publie en 2008 un gros volume de 500 Microfictions d'une page et demie...

Modèle économique mixte pour ces cinq minutes de littérature quotidienne. Achat et Parrainage : une marque peut parrainer un livre. Répétition assurée puisque le parrain est présent chaque jour. Ciblage séduisant, affinité élective. Sans doute est-ce le parrain qui choisit le livre à publier. Certain titres sont vendus, d'autres gratuits. L'abonné peut choisir ses horaires de livraison, la police et la taille de caractère, notamment pour la lecture sur iPhone.
Plus d'un millier de livres disponibles, quelques uns en allemand, anglais, italien, espagnol.

Chaque média redécoupe les oeuvres, rythme les publications et façonne l'attention. Entrons-nous dans une ère de tout petits formats (RSS, clips, Twitter, SMS) ? Internet bouleverse la distribution et par conséquent le packaging aussi. Les légitimistes de la culture s'en émeuvent. Il en fut de même pour chaque mode de distribution précédent (tablettes, rouleaux, parchemins, papier, imprimerie).

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Faut-il se battre contre les moulins à vents et porter comme un Don Quichotte l'étendard de l'effort et l'éloge du prendre son temps ?
Nous n'avons pas d'autre chemin à suivre que celui d'évoluer, de progresser, de s'adapter bien sûr au monde qui change.
Relisons et méditons quand même ce qu'Elisabeth Rudinesco disait en novembre dernier sur France Inter : " Le temps se restreint parce qu'on est dans une époque qui ne veut pas penser"

Cassandre Sevestre a dit…

Très intéressant votre article, le lire en 2018 a d'ailleurs une autre saveur.
En 2009 on s'insurgeait de voir un livre coupé en fragment de 5 minutes. En 2018 des start-up comme Koober propose de résumer un livre entier en un podcast. Le pitch ? "Essaye gratuitement les Koobs: des formats condensés de 20 minutes qui te donnent l'essentiel des meilleurs livres start-up & développement personnel."
Ces transformations illustrent assez bien un proverbe italien : "D'autres temps, d'autres mœurs et d'autres systèmes"